Réflexions sur le rire : connaissances et arguments

Réflexions sur le rire

            En tant que phénomène humain, le rire suit les évolutions des hommes, donc de la société en fonction de l’Histoire. On sait ainsi que le rire est collectif et qu’il implique la présence de plusieurs personnes.

Sur le plan historique, on peut observer des modifications en fonction des époques : le rire des saturnales romaines, ces fêtes qui permettaient une inversion des positions sociales, ne faisait pas bon ménage avec le christianisme à ses débuts.

Le rire de la Renaissance, illustré par les excès de langage de Rabelais, traduisait par la démesure l’intense curiosité d’un monde nouveau en même temps qu’une forme de scepticisme lucide.

Après le rire « correcteur » de Molière, dans un siècle moralisateur, et l’ironie critique du siècle des Lumières, le XIXème siècle invente la caricature politique.

Le XXème siècle, avec un irrespect destructeur hérité des bouffons de l’époque des rois, utilise la dérision pour s’attaquer aux institutions, à leurs représentants et à tout ce qui se croit protégé par le politiquement correct : il n’y a plus de sacré, plus de domaines réservés. Mais en étant partout, associé à toutes les formes de représentations et devenu quasi automatique, le rire se dilue dans le divertissement et perd sa force corrosive.

Au Moyen-âge, le rire est diabolisé. Sa frénésie provoque suspection et inquiétude. Il provoque l’humiliation, le ridicule. Il dérègle les normes établies en en valorisant certaines et en en disqualifiant d’autres. Le rire était synonyme d’agressivité. En effet, le bouc émissaire (le fayot) était martyrisé par le groupe qui se défoulait sur lui par le rire.

Le rire portait aussi, à l’époque, sur l’exclusion (ex : le bouffon du roi qui était chargé de faire rire les puissants, recrutés sur des critères physiques).

            Pour l’église, le rire est le refus de la bienséance (affilié au diable). En effet, le rire est diabolisé au début de la chrétienté.

Pendant la période de carnaval, le « rire pascal » correspond à une période durant laquelle les farces sont autorisées à l’église. Le rire permet de se venger de l’ordre établi.

Les fonctions culturelles et émotionnelles du rire varient. Le sourire japonais n’est pas une marque d’amusement ou de relaxation mais bien l’effet d’une loi de l’étiquette, élaborée et apprise très tôt chez le jeune, un devoir social. Ce langage silencieux n’exprime pas, comme en Occident, l’agrément mais la gêne. C’est l’anecdote de cette servante japonaise en Europe qui vint demander à sa maîtresse, avec un grand sourire, la permission d’aller aux funérailles de son mari et qui revint présenter les cendres de son mari dans une petite urne avec un sourire encore plus appuyé.

En Occident, dans les milieux mondains, on sourit plus que l’on rit. Dans les milieux paysans, le rire est ou était plus spontané, plus abondant et bruyant. Les Français méditerranéens et plus encore ceux qui vivaient en Algérie ont l’habitude et la réputation d’un rire exubérant.

La première fonction du rire est sociale. Le rire crée la cohésion dans la fête ce qui permet de s’intégrer dans un ou plusieurs groupes. Il permet même parfois d’atténuer des conflits et de désamorcer les tensions mais le rire se fait souvent aux dépens des personnes dont on se moque.

2 fonctions du rire : la fonction défensive et sociale

En premier lieu la fonction défensive comme l’humour noir, permet de transformer la souffrance ou l’horreur en plaisanterie. Comme par exemple «est-ce que la crémation est facturée avec une réduction lorsque la personne décédée est un grand brûlé?» dans ce cas le rire serait même le résultat d’une délivrance.

Puis la fonction sociale qui est sans doute la fonction la plus flagrante remplie par une histoire drôle, qui pour prendre toute sa dimension doit être partagée avec autrui.

En conclusion l’humour permet de rassembler les personnes qui ont envie de rire et unifie les personnes qui ont le même point de vue. De plus, celui qui produit le rire peut se lâcher sans crainte de rejet ou de censure.

Le rire devient rire de résistance quand il refuse de servir le pouvoir dominant. Rire est alors un moyen d’entretenir une révolte vivante et communicative face aux oppressions qui menacent l’homme dans ses libertés fondamentales.

Le rire véritable est toujours un rire de résistance face à toutes les formes de pouvoir.

Le rire se présente sous des formes très différentes : un rire qui dénonce pour corriger et un autre, subversif et destructeur dont la finalité est de faire se fissurer les certitudes, les préjugés, les conventions et les contraintes.

Le rire correcteur est utilisé par certains humoristes. Ils mettent en lumière par des jeux de décalage et l’expression d’incohérences, les dysfonctionnements sociaux. Ils bravent les différentes censures.

Dérision et Politique. La satire est très importante en politique mais les moqueries ne doivent pas être gratuites et uniquement méchantes. Les meilleurs débats ont lieu quand les opposants se respectent ce qui n’est pas du tout le cas lorsqu’un humoriste s’attaque gratuitement à un invité en direct à la radio ou à la télévision. On peut rester piquant et pertinent tout en demeurant respectueux des personnes dont on se moque. Les humoristes bénéficient d’une liberté en France.

L’humour a tout les droits et d’abord ceux de l’outrance, de la caricature et même de la méchanceté.

On rit sur la base de références communes (même culture). Cependant, certaines situations sont universellement drôles. En effet, certains artistes sont reconnus internationalement (Charlie Chaplin, Jim Carrey, Les Simpson…) et traversent les générations.

L’humour prend des thèmes différents selon les origines, religions, cultures. En effet, chaque culture ne rit pas des mêmes choses (humour anglais pour les situations absurdes, humour juif touné vers l’avarice et la surprotection des mères, l’humour noir qui insiste plus sur le macabre, la mort…).

L’humour, qu’il soit comprit par tous ou par une seule communauté, comporte des limites que chacun se fixe. Selon le contexte, une personne va juger si c’est drôle, ou si ça ne l’est pas. Le rire et subjectif.

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