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Les caricatures de Mahomet + humour et shoah

30 septembre2005 Le journal danois « Jyllands-Posten » publie douzecaricatures qui représentent Mahomet. Les réactions des musulmans sont immédiates et ces derniers se sentent bafoués dans leurs croyances. Selon lareligion islamique, toute représentation du prophète est interdite. La controverse deviendra rapidement internationale, les manifestations plus ou moins violentes perdureront pour finalement aboutir aux excuses formulées par le journal danois pour avoir offensé les Musulmans

       Caricatures de Mahomet : de l’humour à la haine …

Le débat sur les caricatures publiées en septembre dernier dans les pages du journal conservateur danois Jyllands-Post et reprises à travers toute l’Europe a franchi une nouvelle limite cette semaine. Après les menaces de morts, la démission de différents diplomates, le boycott et les sanctions diplomatiques, certains journaux en France, en Allemagne, en Hollande, en Italie et en Espagne ont repris les dessins incriminés. Parmi ceux-ci, une caricature de Mahomet qui porte un turban ayant la forme d’une bombe. Dernier rebondissement en date, le limogeage mercredi 1er février, du rédacteur en chef du quotidien France Soir par son propriétaire franco-égyptien du journal, Raymond Lakah. Une attitude qui relance les discussions à travers toute l’Europe quant au « droit de blasphémer » des citoyens.

Partout ailleurs sur la planète, l’affaire prend des proportions inattendues. Jeudi matin dans la bande de Gaza, des hommes armés palestiniens ont fait irruption dans les bureaux de la représentation de l’UE. Ils ont exigé des excuses des gouvernements français, danois et norvégiens sous 48 heures et menacé les ressortissants étrangers. Mais est-il du ressort des Etats d’intervenir dans la liberté d’expression et de demander pardon pour ce qu’écrivent leurs journaux ? Au même moment, et le contraste est saisissant, le gouvernement britannique a échoué à faire voter la mouture d’une loi sur la haine raciale et religieuse. Un rejet salué par de nombreux artistes, écrivains et comédiens notamment parce qu’il leur permet de conserver le droit de critiquer d’autres croyances et religions.

         Satire ou incitation à la haine ?

Mais à quel point les caricatures jugées offensantes sont-elles anti-islam ? La clef de voûte de l’argumentaire des opposants à leur publication repose sur l’idée que la religion musulmane ne tolère pas que le Prophète soit représenté, dans la mesure où aucun être humain n’est apte à traduire la beauté et la grandeur de sa personne. Les dessins sont-ils alors une véritable représentation ou de simples caricatures ? Leur contenu peut certes être blessant, mais va t-il jusqu’à inciter à la haine raciale ? Il est clair que les esprits rationnels qui jetteront un œil à ces dessins se cantonneront à leur aspect satirique mais que d’autres pourront en tirer une image désastreuse du monde musulman, sans nécessairement les avoir vues d’ailleurs.

        

          Liberté d’expression

La nature même de la religion, de la politique et surtout de l’humour est subjective. S’il vous arrive de trouver quelque chose de choquant dans les médias et tant qu’il ne s’agit pas de quelque chose d’illégal, il vous suffit de ne pas lire le journal qui vous déplaît ou de zapper. Au Royaume-Uni, ceux qui par exemple accusent The Daily Mail d’être xénophobe ou le Sun d’adopter des opinions violemment homophobes choisissent simplement de ne pas les lire. Ironiquement, c’est finalement toute cette agitation autour des caricatures danoises qui pourrait inciter à la haine raciale : en étant utilisée pour attiser les tensions ethniques autour de l’idéologie selon laquelle la censure ne serait finalement que du politiquement correct qui a mal tourné.

Si le harcèlement racial ou l’incitation à la haine envers un groupe social ne devrait jamais être toléré, il est vital de préserver le droit de critiquer, de tourner en ridicule et de faire des caricatures du monde qui nous entoure. A l’image de ce que disait Voltaire, il y a déjà plusieurs siècles « je ne suis pas d’accord avec un mot de ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour votre droit de le dire ». Une phrase qui devrait devenir le slogan de toute société dite moderne et progressiste.

Février 2006

La Shoah ? Même pas drôle

         

          Faire rire avec l’Holocauste, quelques humoristes israéliens s’y risquent. Non sans susciter le scandale et la polémique.

Le plus gros tabou de la société israélienne est une source intarissable d’humour noir mais refoulé : la Shoah. Pourquoi est-il quasi impossible de faire rire de la Shoah et comment y parvenir ?

            “Je vous donne les mots ‘Hitler’ et ‘tomate’. A présent, écrivez n’importe quelle phrase entre ces deux mots et vous obtiendrez une bonne petite blague.” (Uzi Weil, “Quatrième de couverture”,chronique de l’hebdomadaire Ha’Ir [La Ville]). Hitler et une tomate ? Le mal incarné et un simple légume ? Sans la phrase demandée, l’absurde de la situation saute aux yeux. Mais un sentiment de culpabilité vient aussitôt se greffer. Une blague sur la Shoah ? Pas question ! Et pourtant. C’est tellement gros qu’il est presque impossible de ne pas rire. Oh ! on s’excusera aussitôt en prétendant que c’est un rire désespéré, la seule excuse pour justifier que l’on puisse rire en entendant ceci : où se trouvait la plus forte concentration de Juifs pendant le génocide ? Réponse : dans l’atmosphère.

Cela fait soixante ans qu’Israël existe, mais le thème de la Shoah est toujours un passager clandestin de l’humour national, en dépit de quelques vaines tentatives d’immoler cette vache sacrée. Car que peut-on trouver de drôle dans le décompte de 6 millions de cadavres ? Rien.

Ainsi, à l’occasion de dérapages verbaux, la polémique s’enflamme rapidement. “Le ketchup, c’est l’Auschwitz des tomates.” Voici ce qu’a déclaré le président de l’Organisation des cultivateurs de tomates de la vallée du Jourdain, dans un discours prononcé lors d’une manifestation contre la décision de la Knesset d’augmenter le pourcentage de tomate dans la fabrication du ketchup. Le président s’est finalement excusé.“Tout d’abord, je n’ai pas comparé la Shoah au ketchup. J’ai dit que c’était comme la Shoah, dans le sens que c’était une catastrophe. Deuxièmement, je suis le petit-fils de rescapés des camps et je n’ai pas l’intention de relativiser le génocide. Troisièmement, si quelqu’un a le droit de relativiser la Shoah, c’est bien moi, parce que je suis le petit-fils de rescapés. Mais je n’ai pas fait de comparaison. Comment oserais-je faire une comparaison ? La Shoah, c’était horrible, c’était franchement horrible.

” “Sur les radios généralistes, il est tout simplement impossible de toucher à la Shoah”, dit le comédien Guy Meroz. Il sait bien de quoi il parle. En janvier dernier, un scandale éclatait à la suite de Pini Ha’Gadol, une émission diffusée sur Beep, une chaîne pour la jeunesse. Un acteur déguisé en Hitler se mettait à chanter des chansons enfantines populaires. Dans un autre sketch, de faux sous-titres étaient incrustés sous des extraits du documentaire Shoah de Claude Lanzmann. Diffusés en plein été, ces programmes furent ensuite “nettoyés” après une plainte du Conseil de l’audiovisuel. Meroz s’est excusé personnellement dans une tribune du quotidien populaire Maariv. Il jure encore qu’il n’a pas voulu faire rire de la Shoah. “Il n’y a rien de drôle dans la Shoah, mais, comme humoriste, vous devez vous frotter aux extrêmes. Mais la Shoah est trop extrême et trop au cœur de nos vies.”

            Comme la plupart des humoristes israéliens, Reshef Lévy pense que la présence des rescapés des camps est une entrave au développement d’un humour israélien assumé sur la Shoah. “A mon sens, quand le dernier rescapé mourra, une orgie d’humour explosera ici et les chaînes généralistes s’en délecteront en prime time. Mais, pour l’instant, nous subissons tous la dictature d’un certain éthos israélien véhiculé par nos institutions culturelles et politiques.”

Pour Reshef Lévy, la paranoïa que la nation israélienne a développée autour de la Shoah est ce qui fonde et justifie sa présence sur cette terre d’Orient. “C’est la raison pour laquelle nous parvenons à encaisser les attentats. Parce que nous n’avons nul endroit où aller, et parce que nous sommes convaincus qu’en Europe les nazis nous attendent. Un Etat d’Israël qui affronte une menace existentielle permanente ne peut vivre sans la mémoire de la Shoah et la répression de tout humour sur la Shoah. Dès l’instant où vous riez de quelque chose, vous banalisez cette chose et vous en faites un élément du quotidien. Si nous désacralisions la Shoah, peut-être devrions-nous admettre que certaines conclusions que nous en avons tirées ne sont pas exactes, ce qui risquerait de saper les fondements de l’Etat d’Israël.”

 

Sarah Blau   (Article paru dans le n° 724 de Courrier international, le 16 septembre 2004)

Réactions d’internautes : Peut-on rire de la Shoah ?

         Peut-on rire de tout ? Je ne le crois pas. Il y a beaucoup de thèmes, même graves, qui peuvent être sujets à l’humour. De multiples domaines peuvent être contrés par l’humour, mais rire du malheur des autres me semble abaisser l’homme au même niveau que les tortionnaires qui ont causé ces malheurs dont on voudrait rire…

Si encore cela pouvait être pédagogique … mais cela ne l’est généralement pas. Rire de la shoah, de la maigreur des gens frappés de famine, des victimes de Pinochet ou de Staline … nous déchoit de l’humanité dont nous nous réclamons.

Est ce un sujet qui prête à rire ? Est ce que le massacre de millions d’individus prête à rire ?

Pour répondre à la question “peut-on rire de tout” dans l’absolu, on peut dire que oui (pas forcement avec tout le monde)….mais rire de l’abominable, de l’horreur absolue, n’est ce pas quelque part la banaliser ?

                                           Film de Benigni : La Vie est belle

       La Vie est Belle sort le 20 Décembre 1997 en Italie, puis est présenté au Festival de Cannes en Mai 1998 et sort par la suite dans le monde entier. Le sujet : Guido est déporté en camp de concentration avec sa femme et son petit garçon. Il n’a qu’une idée : les aider à tenir et cacher la vérité à son fils. Il explique au petit que ce séjour est un jeu de survie, au terme duquel on peut gagner un char, un vrai !

 

 

            L’auteur est un clown, ce qui n’a rien d’inconvenant et peut même se révéler très utile en politique. La dérision, dans ce domaine, est d’une redoutable efficacité et Le Dictateur, de Chaplin, est là pour en témoigner.

Quand il se cantonne dans la satire, le clown est excellent, mais dès qu’il veut se montrer plushumain, il ne peut s’empêcher, là encore et bien malgré lui, de tourner les choses en dérision. Qu’il traite la rencontre amoureuse comme un conte de fée trivial, kitsch et gorgé de clichés poétiques, cela n’est pas bien grave… quand il s’agit d’une comédie, mais qu’il réserve le même traitement à la Shoah… Il y a là un problème de ton… ou de tonalité, si l’on veut.

On ne peut en effet s’empêcher de penser que si l’auteur a choisi l’humour pour évoquer ce drame,car il s’agit d’un drame, c’est pour nous dire que finalement, ces quelques millions de morts, ce n’est pas si grave. Le tout, c’est de voir la vie du bon côté : l’auto-apitoiement, les pleurnicheries, le désespoir et le sentiment tragique, sont stériles et vains, n’ont rien de constructif et ne répondent à rien. Car, il y a chez Guido, cette croyance un peu niaise dans la faculté de l’Homme à surmonter les épreuves que le sort lui inflige. Et c’est là que le bât blesse.

La Shoah, pour Benigni, n’est pas un phénomène historique, c’est un coup du destin. Nous noteronsle peu de présence des gardes nazis, un silence total sur le fonctionnement du camp, cette impression qu’il n’est gardé par personne et ne vit que par lui-même, de toute éternité ; le camp est un mal absolu, bien abstrait, que quelques ombres sont chargées d’exécuter.

Ainsi, toute la complexité du phénomène et ses implications politiques, historiques ou philosophiques, sont gommées. La Shoah, en fin de compte, ce n’est qu’un mauvais tour que le destin joue à Guido, à sa femme et à son fils, cette famille trop unie et trop heureuse pour que la vie, comme dans tout bon mélodrame ne vienne pas la détruire, ou du moins, la mettre à mal. La haine et l’aveuglement d’un peuple, la souffrance et l’humiliation des déportés, de tout cela, de l’extermination de six millions d’individus, rien ou presque rien, ce qui revient au même, rien à proprement parler n’est dit.

 

            Guido est un héros, un héros positif, un homme de rien mais grand par sa droiture et Finalement, avec un personnage comme Guido, les questions posées par la “solution finale” ne sont que de faux problèmes : avec un peu d’humour et beaucoup de courage, on peut s’en tirer : La Vie est belle est là pour nous en faire la démonstration. […]

Mais peut-on divertir avec un tel sujet? Que Guido veuille préserver son fils des horreurs du camp de concentration, c’est tout à son honneur, mais que Benigni nous réserve le même traitement, voilà qui est insultant pour notre intelligence et, surtout, pour la mémoire des victimes et des rescapés de ce massacre. Il ne l’a sans doute pas voulu, mais son film, en banalisant le mal, contribue tout autant que certains discours à l’oubli de cet épisode honteux de l’Histoire de l’humanité. C’est une erreur que Primo Levi, rescapé du camp d’Auschwitz, n’a pas commise en témoignant dans Si c’est un homme, que nous recommandons vivement.

 

 

 

           Les récompenses du film sont nombreuses : tout d’abord le Grand Prix du Jury à Cannes, suivi de 8 Donatello italiens (dont meilleur film, meilleur scénario, meilleur acteur), le César du meilleur film étranger, 7 nominations aux Oscars dont 3 Oscars remportés (meilleur acteur, meilleur film étranger et meilleur scénario), le prix du meilleur film et du meilleur acteur européen, le meilleur film étranger en Allemagne… C’est le plus gros succès financier d’un film italien dans les salles européennes. (…) Toutefois, l’accueil dans la presse reste mitigé. Certains encensent le film tandis que d’autres remettent en question sa légitimité. (…)

Avis tirés de Fnac.com « Peut-on rire de la Shoah ? Telle est la polémique qu’a déclenchée la sortie de ce film. De façon tout à fait injustifiée tant il est vrai que cette oeuvre du trublion italien ne prête à sourire que dans sa seule première partie, volontiers burlesque, quand justement il n’est pas encore question des camps de la mort. Si cette fable s’apparente néanmoins davantage à la comédie qu’au drame, c’est parce qu’elle sait, avec poésie et émotion, nous raconter le formidable amour d’un père prêt à tout pour préserver son fils de la barbarie. Notamment en déployant d’inénarrables trésors d’ingéniosité. Une histoire bouleversante et magnifique qui s’est vu récompensée par une pléiade de prix internationaux, entre autres le Grand Prix du jury 98 à Cannes et trois Oscars 99 dont celui du meilleur film étranger. »

Avis tirés de Cinopsis.com : « La Vie Est Belle est une petite merveille. Sans oser la reconstitutionhistorique, Benigni esquisse l’antre du Mal comme un conte pour enfants, il fait rire sans blesser, il dénonce en donnant un espoir, en criant que malgré tout la vie reste belle et est digne d’être vécue.

Avis de Telerama.fr : « Une émotion poignante infuse peu à peu ce film souvent très drôle, en decourtes scènes où se condense tout le désespoir qui couve. Benigni prend le seul parti possible : il s’éloigne de tout réalisme et stylise pour ne pas trahir. Ce choix, moral autant qu’esthétique, est décisif. Lorsqu’il n’y a plus de quoi rire du tout et que le mal, soudain, devient d’une évidence à pleurer, on mesure la belle réussite du cinéaste. »

Cependant les réactions dans la communauté juive restent mitigées. J. Mandelbaum ,un journalistejuif, voit dans La vie est belle : « Une lame de fond qui, croyant oeuvrer à sa transmission, rend le génocide méconnaissable ».

(…) Dans son interview pour les cahiers du cinéma, Benigni donne son opinion sur ce sujet et tente également de justifier les choix scénaristique qu’il a donné pour son film. En effet, lorsqu’on lui demande si le récit et la mémoire de la Shoah peuvent passer par le rire, il n’hésite pas à répondre : « Quand on me dit que le comique ne peut rendre compte de l’horreur de la tragédie concentrationnaire, ça me blesse. Il y a toujours eu une sorte de racisme artistique envers les comiques, une volonté de censure : « Tu ne peux pas t’occuper de ça ! » Mais moi je ressens la nécessité d’en parler. » D’autre part, lorsqu’on accuse Benigni de trahir la réalité en fuyant toute forme de réalisme dans son œuvre, il se défend en expliquant que selon lui : « A chaque fois que l’on écrit, il s’opère une trahison. L’artiste trahit parce qu’il doit choisir un style, trier la réalité, éliminer des choses, suivre une narration. »

La polémique crée autour du film est principalement due au ton comique de Benigni face à un sujet aussi noir que la shoah et à la façon dont il s’est pris pour mettre en scène l’antisémitisme dans son film.

Face à ces sujets, la question de savoir si l’on peut rire de tout se pose. Cette question est un sujet de discorde pour les philosophes, les critiques ainsi que les spectateurs. Dans son interview pour les cahiers du cinéma, Benigni donne son opinion sur ce sujet et tente également de justifier les choix scénaristique qu’il a donné pour son film.

En effet, lorsqu’on lui demande si le récit et la mémoire de la Shoah peuvent passer par le rire, il n’hésite pas à répondre : « Quand on me dit que le comique ne peut rendre compte de l’horreur de la tragédie concentrationnaire, ça me blesse. Il y a toujours eu une sorte de racisme artistique envers les comiques, une volonté de censure : « Tu ne peux pas t’occuper de ça ! » Mais moi je ressens la nécessité d’en parler. »

D’autre part, lorsqu’on accuse Benigni de trahir la réalité en fuyant toute forme de réalisme dans son œuvre, il se défend en expliquant que selon lui : « A chaque fois que l’on écrit, il s’opère une trahison. L’artiste trahit parce qu’il doit choisir un style, trier la réalité, éliminer des choses, suivre une narration. J’ai aussi pensé à cette belle phrase de Keats : “Ce n’est pas ce qui est vrai qui est beau, c’est ce qui est beau qui est vrai.” Quand une chose est belle, elle devient réelle. Si le film est réussi, et j’espère qu’il l’est, le camp devient vrai. »

Pour conclure la pensée de Benigni, on peut effectivement rire de tout, mais seulement à condition de rester sincère, pudique et digne surtout lorsqu’il s’agit d’un sujet « tabou » par excellence, ici les camps de la mort.

Réflexions sur le rire : connaissances et arguments

Réflexions sur le rire

            En tant que phénomène humain, le rire suit les évolutions des hommes, donc de la société en fonction de l’Histoire. On sait ainsi que le rire est collectif et qu’il implique la présence de plusieurs personnes.

Sur le plan historique, on peut observer des modifications en fonction des époques : le rire des saturnales romaines, ces fêtes qui permettaient une inversion des positions sociales, ne faisait pas bon ménage avec le christianisme à ses débuts.

Le rire de la Renaissance, illustré par les excès de langage de Rabelais, traduisait par la démesure l’intense curiosité d’un monde nouveau en même temps qu’une forme de scepticisme lucide.

Après le rire « correcteur » de Molière, dans un siècle moralisateur, et l’ironie critique du siècle des Lumières, le XIXème siècle invente la caricature politique.

Le XXème siècle, avec un irrespect destructeur hérité des bouffons de l’époque des rois, utilise la dérision pour s’attaquer aux institutions, à leurs représentants et à tout ce qui se croit protégé par le politiquement correct : il n’y a plus de sacré, plus de domaines réservés. Mais en étant partout, associé à toutes les formes de représentations et devenu quasi automatique, le rire se dilue dans le divertissement et perd sa force corrosive.

Au Moyen-âge, le rire est diabolisé. Sa frénésie provoque suspection et inquiétude. Il provoque l’humiliation, le ridicule. Il dérègle les normes établies en en valorisant certaines et en en disqualifiant d’autres. Le rire était synonyme d’agressivité. En effet, le bouc émissaire (le fayot) était martyrisé par le groupe qui se défoulait sur lui par le rire.

Le rire portait aussi, à l’époque, sur l’exclusion (ex : le bouffon du roi qui était chargé de faire rire les puissants, recrutés sur des critères physiques).

            Pour l’église, le rire est le refus de la bienséance (affilié au diable). En effet, le rire est diabolisé au début de la chrétienté.

Pendant la période de carnaval, le « rire pascal » correspond à une période durant laquelle les farces sont autorisées à l’église. Le rire permet de se venger de l’ordre établi.

Les fonctions culturelles et émotionnelles du rire varient. Le sourire japonais n’est pas une marque d’amusement ou de relaxation mais bien l’effet d’une loi de l’étiquette, élaborée et apprise très tôt chez le jeune, un devoir social. Ce langage silencieux n’exprime pas, comme en Occident, l’agrément mais la gêne. C’est l’anecdote de cette servante japonaise en Europe qui vint demander à sa maîtresse, avec un grand sourire, la permission d’aller aux funérailles de son mari et qui revint présenter les cendres de son mari dans une petite urne avec un sourire encore plus appuyé.

En Occident, dans les milieux mondains, on sourit plus que l’on rit. Dans les milieux paysans, le rire est ou était plus spontané, plus abondant et bruyant. Les Français méditerranéens et plus encore ceux qui vivaient en Algérie ont l’habitude et la réputation d’un rire exubérant.

La première fonction du rire est sociale. Le rire crée la cohésion dans la fête ce qui permet de s’intégrer dans un ou plusieurs groupes. Il permet même parfois d’atténuer des conflits et de désamorcer les tensions mais le rire se fait souvent aux dépens des personnes dont on se moque.

2 fonctions du rire : la fonction défensive et sociale

En premier lieu la fonction défensive comme l’humour noir, permet de transformer la souffrance ou l’horreur en plaisanterie. Comme par exemple «est-ce que la crémation est facturée avec une réduction lorsque la personne décédée est un grand brûlé?» dans ce cas le rire serait même le résultat d’une délivrance.

Puis la fonction sociale qui est sans doute la fonction la plus flagrante remplie par une histoire drôle, qui pour prendre toute sa dimension doit être partagée avec autrui.

En conclusion l’humour permet de rassembler les personnes qui ont envie de rire et unifie les personnes qui ont le même point de vue. De plus, celui qui produit le rire peut se lâcher sans crainte de rejet ou de censure.

Le rire devient rire de résistance quand il refuse de servir le pouvoir dominant. Rire est alors un moyen d’entretenir une révolte vivante et communicative face aux oppressions qui menacent l’homme dans ses libertés fondamentales.

Le rire véritable est toujours un rire de résistance face à toutes les formes de pouvoir.

Le rire se présente sous des formes très différentes : un rire qui dénonce pour corriger et un autre, subversif et destructeur dont la finalité est de faire se fissurer les certitudes, les préjugés, les conventions et les contraintes.

Le rire correcteur est utilisé par certains humoristes. Ils mettent en lumière par des jeux de décalage et l’expression d’incohérences, les dysfonctionnements sociaux. Ils bravent les différentes censures.

Dérision et Politique. La satire est très importante en politique mais les moqueries ne doivent pas être gratuites et uniquement méchantes. Les meilleurs débats ont lieu quand les opposants se respectent ce qui n’est pas du tout le cas lorsqu’un humoriste s’attaque gratuitement à un invité en direct à la radio ou à la télévision. On peut rester piquant et pertinent tout en demeurant respectueux des personnes dont on se moque. Les humoristes bénéficient d’une liberté en France.

L’humour a tout les droits et d’abord ceux de l’outrance, de la caricature et même de la méchanceté.

On rit sur la base de références communes (même culture). Cependant, certaines situations sont universellement drôles. En effet, certains artistes sont reconnus internationalement (Charlie Chaplin, Jim Carrey, Les Simpson…) et traversent les générations.

L’humour prend des thèmes différents selon les origines, religions, cultures. En effet, chaque culture ne rit pas des mêmes choses (humour anglais pour les situations absurdes, humour juif touné vers l’avarice et la surprotection des mères, l’humour noir qui insiste plus sur le macabre, la mort…).

L’humour, qu’il soit comprit par tous ou par une seule communauté, comporte des limites que chacun se fixe. Selon le contexte, une personne va juger si c’est drôle, ou si ça ne l’est pas. Le rire et subjectif.

Expr. perso. : peut-on rire de tout ?

          Le rire français s’inscrit dans une tradition séculaire. Il peut être gaulois, grivois ou encore relever d’une tradition plus intellectuelle et critique dans la lignée des Lumières. Il peut être franc et direct, ou beaucoup plus subtil et indirect.

    Finalement, il est protéiforme et semble ne connaître aucun interdit. Pourtant, la question est sans cesse remise en débat : peut-on rire de tout ?

 

 

         Dans l’absolu, on doit pouvoir rire de tout. Le rire est l’expression la plus simple de la liberté d’expression. D’ailleurs, les dictatures comme celle des Talibans en Afghanistan, il y a quelques années, ne s’y trompent pas et l’interdisent. En France, au 17ème siècle, le parti des Dévots n’a pas supporté les attaques et la satire de Molière contre leurs excès.

        1 Le rire a alors été censuré : la pièce de Tartuffe a été interdite. Si Montesquieu et Voltaire, illus­trant le combat des Lumières, n’ont pu critiquer le pouvoir, la religion, la société que par le biais de l’ironie et en publiant leurs œuvres sous le manteau, c’était pour obtenir cette liberté de tout dire.

         Rire de ce qui fait peur ou de ce qui est tabou est communément    admis : la mort, la maladie, le sexe sont aujourd’hui des sujets constamment repris dans les sketchs, les one-man-shows, mais on les retrouve dans toute l’histoire du rire.

 

2 Pourtant, ces sujets graves peuvent poser problème sur plusieurs plans. Sur le plan juri­dique, le droit à la critique et à la caricature garantit l’activité des satiristes et des humo­ristes mais le rire dont l’objet est la religion peut encore aujourd’hui susciter des réactions violentes : on se souvient de l’affaire dite des « caricatures de Mahomet ». Un journal danois a publié en 2005 des caricatures du prophète Mahomet, provoquant une vague d’indignation dans le monde musulman. Pour manifester leur soutien, plusieurs journaux ont repris en France ces caricatures. Un procès s’ensuivit réaffirmant le droit le plus absolu à la caricature. Pour autant, sur le plan religieux et moral, on peut comprendre que la représentation du prophète, interdite par l’Islam, ait pu provoquer l’indignation, tout comme certains catholiques peuvent être heurtés par une représentation du pape qui le tourne en dérision et le ridiculise. 3  De la même façon, il y a un certain nombre de sujets tabous : Peut-on rire du handicap ? Peut-on rire d’une blague raciste ou    misogyne ?

        

        

         En fait, Pierre Desproges a répondu de façon assez définitive à la question : on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. Il s’agit, d’abord, de l’interlocuteur : l’humour, l’ironie ne sont pas appréciés de la même manière selon les personnes : ce qui fait rire l’un peut choquer l’autre. Les circonstances, aussi, sont importantes. 4… Les circonstances, aussi, sont importantes. On peut faire une blague miso­gyne ou jouer des origines ou de la couleur de peau, mais est-ce la même chose de le faire avec un macho vulgaire et un raciste  patenté ?

         Tout est affaire de contexte. Or l’humour passe aujourd’hui par la télévision. Il n’y a pas média qui soit plus « de masse » que celui-ci. C’est pourquoi l’humour pose tant de problèmes à la télévision : dès qu’un dérapage a lieu, ce sont toutes les associations de défense qui se manifestent. Même un humoriste comme Jean-Marie Bigard, dont le fonds de commerce est la sexualité, peine à passer à la télévision à une heure de grande écoute. 5… La conséquence la plus immédiate est que le rire télévisuel est de plus en plus consensuel et qu’il s’attaque, finalement, à ce qui fera le moins de remous aujourd’hui : le pouvoir politique.

 

 

        

         Il existe donc aujourd’hui une forme d’autocensure liée aux modes de diffusion du rire dans les médias de masse. Devant s’adresser à tout le monde, le rire est lissé et purgé de toutes ses aspérités. On peut rire de tout, le cas extrême des caricatures de Mahomet le rappelle, mais on ne le fait plus vraiment sous la dictature du « politiquement correct ».

 

 

Synthèse : rire et liberté/Censure

LA SYNTHESE DE DOCUMENTS

 

CORPUS

 

  1. P. SlANKOWSKI, « Peut-on rire de tout ? », Label France, n° 56, 2004.     .

 

  1. J.-G. fredet, « Gaspard Proust : Rire sans frontière », Le Nouvel Observateur, 14 au
    14 avril 2010.

 

  1. V. BROCARD, « Stéphane Guillon ou l’humour du risque », Télérama, 31 décembre
    2008.

 

  1. Plantu, Bonne année 2009 sur plantu.fr.

 

 

 Document 1 : Pierre siankowski, « Peut-on rire de tout ? », Label France, n° 56, 2004

 

            A la question : « Peut-on rire de tout ? », l’humoriste français Pierre Desproges répondait, de façon presque définitive : « On peut rire de tout, oui, mais pas avec n’importe qui. » La question, qui fleure bon la dissertation de philosophie, est régu­lièrement posée dans le débat public français, et les histoires les «moins drôles » provoquent parfois des poursuites judiciaires.

            Si la législation française est plutôt tolérante vis-à-vis de l’humour, qui jouit comme toute forme artistique de la primauté donnée à la « liberté d’expression » dans la Consti­tution, encore faut-il pouvoir justifier qu’il s’agit bien toujours de cela lorsque l’on s’aven­ture sur un terrain glissant, au risque d’être accusé d’« injure » ou de « diffamation ».

« On peut rire de tout, oui, mais à condition d’être drôle », pourrait-on dire. L’enjeu est là, et il est de taille. Car, à l’heure des tensions identitaires, de la judiciarisation de la société et du triomphe du « politiquement correct » — qui a notamment le mérite de sensibiliser l’opinion au problème des discriminations —, l’humour, comme toute autre forme d’ex­pression, est soumis à de fortes pressions.

            Rire, est-ce forcément se moquer, mettre à l’index ou stigmatiser ? Le comique ne peut-il fonctionner qu’au détriment d’un autre sur le modèle du fameux gag de la « tarte à la crème » ? Juridiquement, la frontière du « drôle » et du « pas drôle » est très difficile à fixer, c’est une certitude. Ce qui fait rire les uns peut laisser froids les autres, voire les offusquer. Comme la tragédie classique, le comique doit savoir respecter des unités, de temps et de lieu : « On peut rire de tout, mais pas n’importe où et pas n’importe quand »,pourrait-on sug­gérer. Mais, outre l’importance du lieu et du climat – de tension – dans lesquels les blaguessont faites, c’est avant tout la subtilité du comique et son aura qui font la différence, qui légitiment l’humour, même le plus culotté.

            Quand Desproges singe Adolf Hitler, quand Coluche raille les policiers, quand Valérie Lemercier montre ses seins sur scène ou quand le très populaire Jamel Debbouze égratigne ouvertement Bernadette Chirac, les bornes sont peut-être franchies, d’un strict point de vue juridique, mais tout le monde rit avec eux. Question de talent ? Question surtout d’intention, car ces humoristes sont à la recherche permanente d’une forme d’humour universelle et partageuse. Parfois très acides et adeptes du flirt avec les limites, des artistescomme Coluche ou Desproges ont toujours réussi à se protéger en concevant peut-être le rire comme un     « vouloir rire ensemble », une expression qui les aurait sans doute fait sursauter. Mais celle-ci résume pourtant bien une envie de ne pas exclure, de considérer l’humour comme un acte rassembleur, que la loi respecte alors au plus haut point. Car, c’est sûr, lorsqu’il est déclenché pour tous, le rire protège de tout et de tout le monde. « On peut rire de tout, mais à condition que tout le monde rie », serait alors un élément de réponse, mais qui n’aurait certainement pas plu à Pierre Desproges.

 

 

 Document 2 : Jean-Gabriel fredet, « Gaspard Proust : Rire sans frontière », Le NouvelObservateur, 14 au 14 avril 2010

 

            Un humoriste peut-il tout dire sans se soucier des réactions du    public ? C’est le credo de cevirtuose de l’humour noir, mi-suisse, mi-slovene, qui était, il y a trois ans, gestionnaire de for­tune. L’humour, Paris ? « Un peu par défaut », explique ce trentenaire au physique de jeune premier produit par Ruquier qui dilacère1 sans tabous car « la scène donne tous les droits ». Odieux, désespéré. Ou notre semblable, notre frère- ?

 

            Pour avoir parlé d’un « beauf à gourmette avec sa pute à frange », on vous classe humoriste politique, ultraradical…

 

            C’est très réducteur. Je ne parle pas de politique dans le spectacle. L’allusion à Sarkozy ? Ce sont les spectateurs qui font le lien. C’est ce que voit le personnage que je joue. D’ailleurs, en comparaison d’Angela Merkel et de son compagnon, Sarko et Carla forment le couple le plus sexy du monde.

 

            La gauche, la sexualité, les vieux, les handicapés, les femmes, les ouvreuses ou leséclairagistes « forcément CGT» de votre spectacle, vous n’épargnez personne…

 

            Mon personnage est un cartésien désabusé. Plus observateur de la réalité que cynique. Sans jugement moral. Sa vision de la vie est glauque ? Elle reflète la réalité avec une dose de sophisme2. C’est un point de vue sur le monde avec zapping et une once d’autobiographie : comme mon personnage, j’ai une propension au tragique et je n’aime ni les happy ends ni les bien-pensants. C’est un parti pris. Je n’ai pas à le justifier. Mais il n’y a aucune volonté de choquer. Mes digressions sur la maladie ? Tourner en dérision le dramatique est une manière de faire un bras d’honneur à la mort, de lui dire « tu ne nous auras pas ». Je ne cherche pas à convaincre. L’humoriste ne doit pas se restreindre. Le public prend ou pas.

 

            Certains rient à gorge déployée, d’autres rient jaune… C’est quoi un spectacle réussi ?

 

            C’est quand il y a du rythme et que quelque chose se passe avec la salle. Mon spectacle n’est pas fédérateur ni le public homogène : l’applaudimètre n’est pas un critère.

 

            Certains rient, d’autres grincent. Mais on sent intérieurement quand ça marche. Parfois la salle serégale et je me dis : «J’ai été     mauvais ». Parfois la salle n’est pas super mais je sais que j’ai réussi à faire passer quelque chose.

 

            Pierre Desproges disait : « On peut rire de n’importe quoi, mais pas avec n’im­porte qui. »Vous êtes d’accord ?

 

            Desproges avait emmené avec lui au théâtre son public de la radio. Il ne pouvait donc pas le choquer. Moi, c’est autre chose, je n’ai pas un public acquis. Si j’appliquais la devise de Desproges, il faudrait un questionnaire à l’entrée de la salle. Donc j’assume, je parle de tout, des juifs, des islamistes, des prêtres – j’ai longtemps voulu faire prêtre, mais j’étais trop timide pour aborder les enfants.

 

            Vos admirations, vos projets ?

 

            Dans le comique, je n’ai pas de modèle. Aller voir les autres ? Je n’ai que le lundi, jour de relâche… comme les autres. Au fond, je fais du rire un peu par lâcheté. Ce qui m’intéresse, c’est la littérature : une phrase qui ne nécessite pas une chute sanctionnée par un rire qui rassure. J’ai une nostalgie du romantisme en littérature, en musique. L’époque portait davantage. Ai-je les moyens, la capacité de travail d’écrire ? En atten­dant, je serai à Avignon pendant le Festival et à l’Européen à la rentrée.

 

  1. Met en pièces.

2.Raisonnement apparemment valide, mais au fond destiné à tromper ou de mauvaise foi.

 

 

 Document 3 : Véronique brocard, « Stéphane Guillon ou l’humour du risque », Télérama, 31 décembre 2008

 

            II est une heure où « Dark Vanneur » se transforme en Droopy. A 7 h 55, Stéphane Guillon, énergique et véhément, entame la lecture de sa chronique noire et corrosive. A 8 h 30, l’humoriste de France Inter, qui fait part de son Humeur – mauvaise, sarcastique et souvent drôlissime – , est paisible, légèrement absent : celui qui a choisi le côté obscur de l’humour vient d’être victime d’une chute d’adrénaline. Le vide après le trop-plein ; le calme après le stress. L’exercice auquel il se soumet depuis un an est en effet un gros mangeur de calories. La peur de se ramasser en direct, l’obligation de faire rire, celle d’être à la hauteur de sa réputation, qui grandit de mois en mois.

            En quatre minutes à l’antenne chaque matin, il déclenche un vent de stupeur, des grincements de dents et des éclats de rire. « Cela me demande beaucoup de travail, d’autant que je suis un laborieux. Quand je m’en sors bien, je mets cinq ou six heures. Je me souviens d’un jour où j’ai commencé le dimanche à 9 heures et je n’avais pas fini le len­demain matin. Je me suis dit que j’allais devenir fou. »

                        Un gros travail donc pour éplucher la presse, trouver le sujet « lié à l’actu que les Fran­çais ont dans la tête », armer sa plume. Tout y passe. Les SDF et les surgelés, Christine Boutin et « l’idée la plus conne de   l’année », la réforme de l’audiovisuel, le méli-mélo socia­liste, « sœur Ségolene arrivant dans sa Ségomobile, ses fidèles massés devant la Maison de la radio dans la ferveur et le recueillement ». Un grand moment. Il y en a d’autres.

 

 

            Stéphane Guillon, qui a fait ses débuts au Fou du roi en 2003, a trouvé son style et sa vitesse de croisière tendance quarantièmes rugissants. Il plonge là où il ne faut pas aller, brasse des mots comme autant de coups de palmes, moquant (généralement) les hommes et les femmes politiques. « J’évite de les croiser. Je refuse les mondanités. Je ne veux ni sym­pathiser ni justifier mon travail. » Une précaution antiporosité qui le fait quitter le studio sitôt commis son forfait comique. On le lui reproche, il s’en fout, comme il se fout des effets retours. Ni le président de Radio France ni le directeur de France Inter ne lui par­lent des coups de fil agacés. Ils ne lui donnent pas non plus de consignes ou d’interdits.

            Protégé et libre, certes, mais seul devant le micro, attendu sans complaisance par plus d’un million six cent soixante mille auditeurs. Ces derniers ont d’ailleurs intérêt à être bien réveillés. Ecouter Stéphane Guillon impose une certaine préparation. Le second degré est un humour qui s’avale l’estomac plein. « Souvent, ils prennent tout au premier degré », constate ce faux cynique en faisant sienne cette injonction de Jean-Louis Fournier, le com­plice de Pierre Desproges : « II faut oser, il est important d’essayer. »

  

                     Janvier Prévision de croissance à la baisse

    SYNTHÈSE         [40 points]

Vous réaliserez une synthèse objective, concise et ordonnée des documents.

    ÉCRITURE PERSONNELLE       [20 points]

Selon vous, peut-on rire de tout ?

Vous répondrez à cette question d’une façon argumentée en vous appuyant sur les docu­ments du corpus, vos lectures de l’année et vos connaissances personnelles.

 

 

 

  • LA SYNTHESE

 

                        Depuis une trentaine d’années, il n’y a plus aucune provocation que les humoristes n’aient tentée. La garantie de la liberté d’expression, la disparition de la censure, la mul­tiplication des médias a permis à tous les rires de s’exprimer.

            Le corpus confirme cet état du rire satirique en France : de Gaspard Proust à Stéphane Guillon en passant par Plantu, on peut rire de tout.   Pourtant, des difficultés persistent : le rire, comme toute parole publique, peut choquer. Dans un article publié dans le maga­zine Label France, Pierre Siankowski rappelle les limites juridiques, mais aussi celles dic­tées par le goût du public.

            On peut donc s’interroger sur cette liberté apparente : le rire satirique est-il vraiment libre en France ?

Après avoir montré qu’en apparence le rire pouvait s’exprimer tout à fait librement, nous verrons qu’il existe néanmoins des obstacles qu’il contourne.

 

 

            Retrouver dans les textes du corpus, des arguments qui viennent illustrer les axes de réflexion présentés ci-dessous.

 

            I. Apparemment, le rire est totalement libre en France

 

  1. Le rire et la critique sont libres en France

 

           

  1. Tous les sujets peuvent être abordés

 

           

            II. Pour autant, malgré la liberté, il existe des obstacles que le rire contourne

 

      ALes humoristes testent les limites

 

 

  1. Emporter l’adhésion du public

 

         

            Le rire est libre en France, pourvu qu’il ne verse pas dans l’injure et la diffamation. Dans ces conditions, le public reste le plus souvent le seul juge même si les humoristes peuvent aussi le prendre à parti pour le déstabiliser. Cela pourrait bien être l’ultime preuve de la vivacité du rire en France : la tolérance du public à son égard lorsqu’il dérange.

 

 

 

 

Article sur les bienfaits du rire + arguments

Qui rit bien… se portera bien

            Il est maintenant largement admis que le rire est favorable à la santé des hommes, des femmes et des enfants. À prescrire sans limite

            « Un cœur joyeux guérit comme une médecine, mais un esprit chagrin dessèche les os », lit-on dans la Bible au Livre des proverbes. Le Créateur avait peut-être même songé à doter les êtres vivants du don du rire depuis les origines, si l’on en croit le neurologue américain Robert Provine interrogé récemment dans le magazine Le monde de l’intelligence : « Nos ancêtres primates possédaient cette forme primaire du rire, ce qui explique que tous les humains naissent avec cette prédisposition, ancrée dans l’évolution de notre espèce. »

 

            Le fait de rire est donc constitutif de notre nature. S’empêcher de rire reviendrait à s’interdire de parler, supplice atroce et pas seulement pour les bavards.

 

            Sans aller jusqu’à des conclusions définitives concernant, par exemple, les effets positifs du rire sur le système cardiovasculaire, respiratoire ou encore psychosomatique, le docteur Henri Rubinstein, neurologue, déclare : « Le rire est à la fois une gymnastique douce, un jogging stationnaire, une méthode de relaxation, une technique de gestion du stress et une façon de “booster” la production de neuromédiateurs tels la sérotonine, la dopamine, et toutes autres substances favorables à la santé que l’organisme peut fabriquer lui-même. Inutile, donc, de les acheter chez le pharmacien ! »

            Le rire soulage les douleurs

            Au regret de décevoir la corporation des laborantins, certains spécialistes prétendent, par exemple, qu’en augmentant les échanges pulmonaires, le rire ferait baisser le taux de graisses sanguines et contribuerait à la prévention de l’artériosclérose. D’autres soutiennent que le rire rétablit l’équilibre entre le système sympathique et parasympathique, ou encore contribue à faire diminuer la tension artérielle.

 

            S’il est difficile de mesurer de manière précise en quoi le rire agit directement sur le fonctionnement du corps en améliorant ses performances, on peut tout de même constater des phénomènes notoirement encourageants, tel celui auquel fait ici allusion le docteur Rubinstein : « La consommation d’antalgiques diminue dans le service d’enfants malades où intervenaient des associations ludiques et des clowns. Car le cerveau, en cas d’hilarité provoquée, produit un surcroît de morphine naturelle qu’on appelle l’endorphine, qui calme et soulage les douleurs. Cela a pu être clairement mesuré. »

 

             « Quand je ris, je m’oxygène, les endorphines abondent et le taux d’adrénaline s’effondre », confiait en 2006 à La Croix Isabelle Pailleau, fondatrice du Club du rire d’Enghien-les-Bains (Val-d’Oise), lancé comme une centaine d’autres en France à la suite d’un reportage sur les clubs de Yoga-rire en Inde inventés par le docteur Madan Kataria.

           

 

            Le rire, remboursé par la Sécurité sociale ?

            Depuis, la contagion s’est étendue. Le rire fait de plus en plus école : « Comment ne pas s’en réjouir ? Je constate en effet que le rire est reconnu et admis comme quelque chose d’utile », relève le neurologue parisien. Seule contre-indication au rire : la période postopératoire ayant entraîné la formation d’une cicatrice abdominale, tant que celle-ci est encore fraîche. Là, surtout, prière de ne pas rire, même si l’on en meurt d’envie ! Mais, comme s’en amuse Henri Rubinstein, « mieux vaut mourir de rire que d’être écrasé par un autobus ! »

 

             Si le rire voire la franche rigolade font tant de bien, pourquoi ne pas les prescrire à tour de bras ? « Un des problèmes de santé publique en France est que certains actes paramédicaux comme les séances de kinésithérapie sont remboursés par la Sécurité sociale tandis que d’autres, comme la prescription d’une psychothérapie, d’une cure de relaxation ou de sophrologie, ne le sont pas », dénonce le neurologue.

 

            Dans ce contexte, et étant donné le déficit chronique de la Sécurité sociale, on peut, certes, douter qu’un jour soient remboursées les séances de décontraction par le rire. Il y va pourtant de l’avenir de la santé publique.

 

                                                                                  La Croix – 04/02/2011

 

 

 

Le rire, pouvoirs, fonctions et effets du rire

 

– rire fait du bien, rien ne vaut une bonne histoire drôle ou un bon éclat de rire pour détendre une atmosphère pesante.

– le rire est le facteur majeur et un élément très important de la convivialité

– le rire répond à un besoin profond de la vie sociale

– le rire fait partie des réponses fondamentales de l’homme confronté à sa situation existentielle

– si le rire est qualifié parfois de diabolique, c’est qu’il a pu passer pour une véritable insulte à la création divine, une sorte de revanche du diable, une manifestation de mépris, d’orgueil, d’agressivité, se réjouissant du mal.

– le rire est un phénomène global dont l’histoire peut contribuer à éclairer l’évolution humaine.

– l’espoir d’améliorer l’humeur et la qualité de la vie sans effets secondaires négatifs notables est assez raisonnable pour mettre en œuvre des rires expérimentaux ou des programmes d’humour dans les services de soins

– le rire permet d’oxygéner l’organisme, de réduire les tensions musculaires, de masser les côtes en plus de faire travailler le diaphragme. Cela favorise entre autres l’élimination des résidus présents dans les poumons et augmente la capacité respiratoire.

– les gens qui ont un plus grand sens de l’humour sont moins affectés par les expériences stressantes. Ils ont plus tendance à les considérer comme des défis stimulants que comme des épreuves pénibles.

– il ne faut pas croire que nous rions uniquement lorsque c’est drôle. Au contraire, cela ne serait le cas qu’une fois sur dix selon le neurobiologiste Robert Provine.

 

            En conclusion, rire et développer son sens de l’humour c’est bon pour la santé physique, mentale et émotive.

 

Le rire peut-il changer le monde ?

Expression personnelle :

 

 

Selon vous, le rire peut-il changer le monde ?

 

            Depuis Aristote, le rire est considéré comme un comportement spécifique de l’être humain.

            Souvent, pour l’illustrer, on cite la célèbre phrase de l’« Avis aux lecteurs » du Gar­gantua de Rabelais : « Rire est le propre de l’homme. »    Cette attitude est donc partagée par tous et dans le monde entier. Pourrait-on en faire un moyen de changer le monde ?

 

 

            A priori, le rire a un pouvoir de subversion universel.

           

            Tout d’abord, cela est dû à son langage qui peut être compris de tous. On constate que les attitudes corporelles qui provoquent le rire sont partout les mêmes. Ainsi, les fameuses « caméras cachées » qui recyclent à souhait les maladresses des uns et les petits accidents des autres font le tour des télévisions sans avoir besoin de traduction ou de commentaire. Partout, le même éclat de rire accompagne les scènes types comme l’Arroseur arrosé ou encore les films de Charlie Chaplin. Cette universalité du rire est aussi la preuve indiscu­table de l’humanité des Indiens dans La Controverse de Valladolid de Jean-Claude Carrière.

 

            Par ailleurs, le rire est souvent utilisé pour son pouvoir de subversion. Il a une portée critique indiscutable : la satire par exemple est un moyen d’argumenter en utilisant le rire. Eviter le côté austère d’un discours par trop sérieux, didactique et souvent ennuyeux, c’est, avec certitude, mettre le plus grand nombre de son côté. Ainsi, ………….

            Donner un exemple d’artiste qui utilise la caricature politique pour dénoncer et faire sourire. (Rédiger.)

 

            Finalement, on comprend que certaines dictatures se méfient excessivement du rire. Il a tout pour déstabiliser un régime et pour lier les hommes les uns aux autres. Son langage est universel et ses bienfaits sont partagés par tous. Ainsi, certains régimes tyranniques ont tôt fait de l’interdire car le rire crée un partage, une communauté de vue propice à la cri­tique et à la remise en question. Au XVIIIe siècle, de nombreux auteurs ont utilisé le rire et ont préparé le changement des mentalités qui se réalisera avec la Révolution de 1789. Ainsi, …………………….

            Quels écrivains au XVIIIème ont utilisé la satire, le rire, pour dénoncer les injustices de l’époque ou les excès du pouvoir ?

 

 

            Nous avons donc vu que le rire est un moyen privilégié de communication entre des êtres humains qui ne parlent pas la même langue et qu’il est à lui seul un langage uni­versel.

            Par ailleurs, ses aspects subversifs en font un moyen privilégié de la critique. Est-ce pour autant qu’il pourrait avoir une action politique et « changer » le monde ?

           

 

 

 

            Pour répondre à cette question, il faut s’interroger sur l’objet même du rire et se demander si, au fond, il a une portée politique – ce que sous-tend l’interrogation initiale. Or la réponse est complexe. Certes, un certain nombre de comiques portent un message poli­tique – direct ou pas.

           

            Guy Bedos n’a jamais caché son penchant à gauche, même s’il a été très critique lorsqu’elle a été au pouvoir. D’autres, comme Thierry Le Luron en son temps, luttent ouvertement contre le Pouvoir. Les images d’archives repassent régulièrement sa parodie de la chanson de Gilbert Bécaud « L’important, c’est la rose », devenue « L’em­merdant, c’est la rose » (la rose étant l’emblème du parti Socialiste).

            Mais ces comiques n’ont pas une portée universelle. Leur propos touche à la politique nationale, à la société française et ils n’ont pas vocation à porter un message propre à apaiser, pacifier le monde.          Leur champ d’action est beaucoup plus restreint et leur influence, même nationale, serait discutable. D’ailleurs, peu de comiques ou d’humoristes sont connus de par le monde, sauf peut-être le mime Marceau, précisément parce qu’il ne parle pas et qu’il n’est pas por­teur d’un message politique.

           

            Ensuite, le rire est le plus souvent tourné vers sa propre fin. Les spectacles tradition­nels comme le cirque ou le théâtre de Guignol n’ont jamais eu pour vocation de changer le monde. Ils sont plutôt une parenthèse, un temps à part qui nous aide à supporter le monde, en nous « changeant les idées », pour reprendre une expression familière. Souvent, le rire est « potache », c’est-à-dire naïf et sans conséquence. D’une certaine façon, c’est le « rire absolu » dans la classification de Baudelaire, rire carnavalesque et libérateur.

 

            Finalement, le rire a ceci d’ambigu qu’il peut être mis au service de n’importe quelle cause, de n’importe quel projet politique. Avec des humoristes qui prônent la tolérance, les échanges entre les peuples, il sera mis au service d’une dénonciation des travers de l’hu­manité et d’un projet de mieux vivre ensemble. C’était déjà la défense de Molière dans sa préface de Tartuffe. C’est aujourd’hui le projet artistique de Fellag. Mais il peut aussi exa­cerber les antagonismes : c’est le rire misogyne ou le rire raciste, c’est-à-dire le rire qui soude un groupe contre un autre et non plus le rire qui unit dans la différence. Il faut reconnaître qu’il existe un rire nauséabond qui entretient les penchants les plus morale­ment condamnables.

            Exemples ?……………………………………………………………….

 

            En conclusion, le rire a tout pour être mis au service d’un monde meilleur. Pourtant, l’action politique n’est pas son domaine de prédilection.

            Au fond, c’est peut-être un bien que de le conserver pour lui-même. C’est ainsi qu’il nous aide le mieux à supporter le monde tel qu’il est à défaut de le changer.

 

Fonctions du rire ( Corpus épreuve BTS)

 

 

  • CORPUS

 

  1. 1.   H. BERGSON, Le Rire: essai sur la signification du comique, 1900.

 

  1. 2. C. BAUDELAIRE, «De l’essence du rire», Salon de 1846.

 

  1. 3. J. HOLT, «Quinze muscles faciaux et quelques bruits involontaires», article traduit d’une publication dansThe Guardian pour Courrier international, supplément au n° 978-979-980, 1°-18 août 2009 © Profile Book.

 

  1. 4.   Affiche du film Le Corniaud, 1965.

 

 

 Document 1 : Henri bergson, Le Rire: essai sur la signification du comique, 1900

 

            Voici le premier point sur lequel nous appellerons l’attention. Il n’y a pas de comique en dehors de ce qui est proprement humain. Un paysage pourra être beau, gracieux, sublime, insignifiant ou laid; il ne sera jamais risible. On rira d’un animal, mais parce qu’on aura surpris chez lui une attitude d’homme ou une expression humaine. On rira d’un chapeau ; mais ce qu’on raille1 alors, ce n’est pas le morceau de feutre2 ou de paille, c’est la forme que des hommes lui ont donnée, c’est le caprice humain dont il a pris le moule. Comment un fait aussi important, dans sa simplicité, n’a-t-il pas fixé davantage l’attention des philosophes ? Plusieurs ont défini l’homme « un animal qui sait rire ». Ils auraient aussi bien pu le définir un animal qui fait rire, car si quelque autre animal y par­vient, ou quelque objet inanimé, c’est par une ressemblance avec l’homme, par la marque que l’homme y imprime ou par l’usage que l’homme en fait.

            […] Notre rire est toujours le rire d’un groupe. Il vous est peut-être arrivé, en wagon ou à une table d’hôte, d’entendre des voyageurs se raconter des histoires qui devaient être comiques pour eux puisqu’ils en riaient de bon cœur. Vous auriez ri comme eux si vous eussiez été de leur société. Mais n’en étant pas, vous n’aviez aucune envie de rire. Un homme, à qui l’on demandait pourquoi il ne pleurait pas à un sermon où tout le monde versait des larmes, répondit:   « Je ne suis pas de la paroisse. » Ce que cet homme pensait des larmes serait bien plus vrai du rire.

            Si franc qu’on le suppose, le rire cache une arrière-pensée d’entente, je dirais presque de complicité, avec d’autres rieurs, réels ou imaginaires. Combien de fois n’a-t-on pas dit que le rire du spectateur, au théâtre, est d’autant plus large que la salle est plus pleine ; combien de fois n’a-t-on pas fait remarquer, d’autre part, que beaucoup d’effets comiques sont intraduisibles d’une langue dans une autre, relatifs par conséquent aux mœurs et aux idées d’une société particulière ?

 

 

 

 

           

 

            Mais c’est pour n’avoir pas compris l’importance de ce double fait qu’on a vu dans le comique une simple curio­sité où l’esprit s’amuse, et dans le rire lui-même un phénomène étrange, isolé, sans rap­port avec le reste de l’activité humaine. De là ces définitions qui tendent à faire du comique une relation abstraite aperçue par l’esprit entre des idées,                « contraste intellectuel », « absur­dité sensible», etc., définitions qui, même si elles convenaient réellement à toutes les formes du comique, n’expliqueraient pas le moins du monde pourquoi le comique nous fait rire. D’où viendrait, en effet, que cette relation logique particulière, aussitôt aperçue, nous contracte, nous dilate, nous secoue, alors que toutes les autres laissent notre corps indif­férent ? Ce n’est pas par ce côté que nous aborderons le problème.

            Pour comprendre le rire, il faut le replacer dans son milieu naturel, qui est la société ; il faut surtout en déter­miner la fonction utile, qui est une fonction sociale.

 

  1. 1.  Ce dont on se moque.

2.Matière pour fabriquer le chapeau.

 

 

 

•   Document 2 : Charles baudelaire, « De l’essence du rire ». Salon de 1846

           

            Si Baudelaire est aujourd’hui connu surtout pour ses poèmes, il a aussi marqué ses contem­porains pour ses activités de critique et d’essayiste.

 

            Le rire est satanique1, il est donc profondément humain. Il est dans l’homme la consé­quence de l’idée de sa propre supériorité ; et, en effet, comme le rire est essentiellement humain, il est essentiellement contradictoire, c’est-à-dire qu’il est à la fois signe d’une grandeur infinie et d’une misère infinie, misère infinie relativement à l’Etre absolu dont il possède la conception, grandeur infinie relativement aux animaux. C’est du choc per­pétuel de ces deux infinis que se dégage le rire.

            Le comique, la puissance du rire est dans le rieur et nullement dans l’objet du rire. Ce n’est point l’homme qui tombe qui rit de sa propre chute, à moins qu’il ne soit philosophe, un homme qui ait acquis, par habitude, la force de se dédoubler rapidement et d’assister comme spectateur désintéressé aux phé­nomènes de son moi. Mais le cas est rare.     Les animaux les plus comiques sont les plus sérieux; ainsi les singes et les perroquets. D’ailleurs, supposez l’homme ôté de la création, il n’y aura plus de comique, car les animaux ne se croient pas supérieurs aux végétaux, ni les végétaux aux minéraux. Signe de supériorité relativement aux bêtes, et je comprends sous cette dénomination les parias2 nombreux de l’intelligence, le rire est signe d’infério­rité relativement aux sages, qui par l’innocence contemplative de leur esprit se rappro­chent de l’enfance.   

 

 

 

 

            Comparant, ainsi que nous en avons le droit, l’humanité à l’homme, nous voyons que les nations primitives, ainsi que Virginie3, ne conçoivent pas la carica­ture et n’ont pas de comédies (les livres sacrés, à quelques nations qu’ils appartiennent, ne rient jamais) et que, s’avançant peu à peu vers les pics nébuleux de l’intelligence, ou se penchant sur les fournaises ténébreuses de la métaphysique, les nations se mettent à rirediaboliquement du rire de Melmoth4 […]

 

  1. 1.  Pour Baudelaire, l’homme, comme Satan, est déchu, c’est-à-dire privé de l’état de grâce originel qui fut celui d’Adam et Eve au jardin d’Éden.

 

2.Personnes méprisées.

 

  1. 3.  Référence à Paul et Virginie, roman de Bernardin de Saint-Pierre, qui raconte l’histoire de deux enfantsélevés sur une île rappellant la beauté originelle du jardin d’Eden.

 

4.Personnage romanesque du XIXe siècle auquel Satan a donné d’immenses pouvoirs.

 

 

•   Document 3 : Jim Holt, «Quinze muscles faciaux et quelques bruits involontaires», article traduit d’une publication dans The Guardian pour Courrier international, supplément au n°978-979-980,1er-18 août 2009 © Profile Book

 

            Tel passage d’une fugue de Bach peut vous donner la chair de poule, telle strophe de Yeats vous faire légèrement frissonner ou faire se hérisser les poils de votre nuque en signe d’appréciation… Mais il est une expérience esthétique dont la manifestation extérieure est flagrante, puisqu’elle entraîne la contraction de quinze muscles faciaux et une succèssion de spasmes respiratoires. L’expérience aurait des effets bénéfiques pour la santé, comme l’oxygénation du sang, une réduction des hormones du stress et un renforcement du sys­tème immunitaire. Si elle est trop intense, toutefois, l’expérience en question peut pro­voquer une cataplexie1, un collapsus2 musculaire, voire de véritables lésions. On cite même des cas, rares, d’issues plus graves : Anthony Trollope fut victime d’une attaque durant une expérience de ce type, à la lecture d’un roman victorien, aujourd’hui oublié, Vice Versa. Et Zeuxis, peintre grec de l’Antiquité, réagissant au portrait d’une sorcière qu’il venait de terminer, en serait mort.

            Je parle du rire, bien sûr. Le rire, notre réaction caractéristique à ce qui est drôle. Pour­quoi une situation amusante suscite-t-elle une telle réaction ? Comment un certain type d’activité cérébrale peut-il aboutir à un réflexe comportemental aussi particulier ?

            On peut rire sans humour ; les chatouilles, la gêne, le protoxyde d’azote3 et l’exultation de la revanche sont réputés provoquer le phénomène.      Mais l’humour sans rire n’existe pas. C’est du moins ce que pensent les philosophes contemporains. « La propension de l’état d’amusement à se manifester par le rire est, peut-on avancer, la composante essentielle de son identité », lit-on à la rubrique « Humour » deL’Encyclopédie de philosophie Routledge.

            Le rire est un phénomène physique. Pour le produire, il faut un corps. Mais la simple pos­session d’un corps ne garantit pas que l’on rie régulièrement. Isaac Newton n’aurait ri qu’une fois dans sa vie, le jour où quelqu’un lui demanda son point de vue sur l’utilité des Eléments d’Euclide. Joseph Staline semble lui aussi avoir été un tantinet agélaste (du grec «a-», préfixe privatif, et «gelos», « rire »). « Rares sont ceux qui ont vu rire Staline », nous apprend le maréchal Joukov dans ses mémoires. « Quand c’était le cas, cela ressem­blait davantage à un gloussement, comme s’il riait pour lui-même. » Parmi les autres agé-lastes célèbres, citons Jonathan Swift, William Gladstone et Margaret Thatcher.

            Comme l’amour, son unique rival en tant que source de plaisir de l’humanité, le rire jette un pont entre la sphère du mental et celle du physique, comme l’a observé l’incom­parable Max Beerbohm dans son essai, Le Rire, daté de 1920. Mais, soulignait Beerbohm, si l’amour vient du physique et trouve sa culmination dans le mental, le rire fonctionne dans l’autre sens.

 

  1. 1.  Perte de tonus musculaire sans perte de connaissance.

 

2.Chute brutale des forces, de la tension artérielle.

 

  1. 3.  Nom scientifique du gaz hilarant.

 

 

 

Document 4: affiche du film le Corniaud1,1965

 

            Le Corniaud est un film réalisé par Gérard Oury en 1965. Les deux acteurs principaux sont Louis de Funes (à gauche sur l’affiche) et Bourvil (à droite). Cette comédie raconte l’his­toire d’un personnage naïf, joué par Bourvil, abusé par un homme d’affaires véreux qui pro­fite de lui et lui fait transporter en Italie de la drogue et des pierres précieuses.

 

 1. Le terme désigne une personne naïve, voire niaise. Dans le film, il s’agit du personnage joué par Bourvil,abusé par celui joué par Louis de Funès.

 

 

SYNTHÈSE  [40 points]

 

Vous réaliserez une synthèse objective, concise et ordonnée des documents.

 

 

ÉCRITURE PERSONNELLE  [20points]

 

Selon vous, le rire peut-il changer le monde ?

Vous répondrez à cette question d’une façon argumentée en vous appuyant sur les docu­ments du corpus, vos lectures de l’année et vos connaissances personnelles.

 

 

 

> LA SYNTHESE

 

                Le rire est une pratique quotidienne de l’homme. Une journée sans rire, dit-on, est une journée perdue. La raison en est simple : rire est peut-être aussi vital que boire, manger et dormir.

            Les documents du corpus nous montrent les différentes composantes du rire humain. Alors que l’affiche du film Le Corniaud met en scène un grand éclat de rire, Jim Holt dans son article détaille ce qui fait la particularité de cette activité corporelle.

            Bergson et Baudelaire complètent l’analyse par une approche complémentaire et tentent, tous deux à leur façon, de définir ce qui fait du rire un comportement spécifiquement humain.

            Au fond, tous apportent des éléments de réponse à une question fondamentale : qu’est-ce que le rire ?

            Après avoir montré que le rire est une réaction corporelle, nous verrons que c’est aussi un phénomène mental.

 

 

Le rire: un phénomène corporel

           

            Relever dans le corpus trois arguments qui soulignent que le rire est avant tout un phénomène corporel.

 

 

 

 

 Le rire: un phénomène mental aussi

 

            Relever deux arguments qui permettent d’expliquer que le rire est surtout un phénomène mental.

 

 

 

 

 

 Expression personnelle :

 

 

Selon vous, le rire peut-il changer le monde ?

 

            Depuis Aristote, le rire est considéré comme un comportement spécifique de l’être humain.

            Souvent, pour l’illustrer, on cite la célèbre phrase de l’« Avis aux lecteurs » du Gar­gantua de Rabelais : « Rire est le propre de l’homme. »    Cette attitude est donc partagée par tous et dans le monde entier. Pourrait-on en faire un moyen de changer le monde ?

 

 

            A priori, le rire a un pouvoir de subversion universel.

           

            Tout d’abord, cela est dû à son langage qui peut être compris de tous. On constate que les attitudes corporelles qui provoquent le rire sont partout les mêmes. Ainsi, les fameuses « caméras cachées » qui recyclent à souhait les maladresses des uns et les petits accidents des autres font le tour des télévisions sans avoir besoin de traduction ou de commentaire. Partout, le même éclat de rire accompagne les scènes types comme l’Arroseur arrosé ou encore les films de Charlie Chaplin. Cette universalité du rire est aussi la preuve indiscu­table de l’humanité des Indiens dans La Controverse de Valladolid de Jean-Claude Carrière.

 

            Par ailleurs, le rire est souvent utilisé pour son pouvoir de subversion. Il a une portée critique indiscutable : la satire par exemple est un moyen d’argumenter en utilisant le rire. Eviter le côté austère d’un discours par trop sérieux, didactique et souvent ennuyeux, c’est, avec certitude, mettre le plus grand nombre de son côté. Ainsi, ………….

            Donner un exemple d’artiste qui utilise la caricature politique pour dénoncer et faire sourire. (Rédiger.)

 

            Finalement, on comprend que certaines dictatures se méfient excessivement du rire. Il a tout pour déstabiliser un régime et pour lier les hommes les uns aux autres. Son langage est universel et ses bienfaits sont partagés par tous. Ainsi, certains régimes tyranniques ont tôt fait de l’interdire car le rire crée un partage, une communauté de vue propice à la cri­tique et à la remise en question. Au XVIIIe siècle, de nombreux auteurs ont utilisé le rire et ont préparé le changement des mentalités qui se réalisera avec la Révolution de 1789. Ainsi, …………………….

            Quels écrivains au XVIIIème ont utilisé la satire, le rire, pour dénoncer les injustices de l’époque ou les excès du pouvoir ?

 

 

            Nous avons donc vu que le rire est un moyen privilégié de communication entre des êtres humains qui ne parlent pas la même langue et qu’il est à lui seul un langage uni­versel.

            Par ailleurs, ses aspects subversifs en font un moyen privilégié de la critique. Est-ce pour autant qu’il pourrait avoir une action politique et « changer » le monde ?

           

 

 

 

            Pour répondre à cette question, il faut s’interroger sur l’objet même du rire et se demander si, au fond, il a une portée politique – ce que sous-tend l’interrogation initiale. Or la réponse est complexe. Certes, un certain nombre de comiques portent un message poli­tique – direct ou pas.

           

            Guy Bedos n’a jamais caché son penchant à gauche, même s’il a été très critique lorsqu’elle a été au pouvoir. D’autres, comme Thierry Le Luron en son temps, luttent ouvertement contre le Pouvoir. Les images d’archives repassent régulièrement sa parodie de la chanson de Gilbert Bécaud « L’important, c’est la rose », devenue « L’em­merdant, c’est la rose » (la rose étant l’emblème du parti Socialiste).

            Mais ces comiques n’ont pas une portée universelle. Leur propos touche à la politique nationale, à la société française et ils n’ont pas vocation à porter un message propre à apaiser, pacifier le monde.          Leur champ d’action est beaucoup plus restreint et leur influence, même nationale, serait discutable. D’ailleurs, peu de comiques ou d’humoristes sont connus de par le monde, sauf peut-être le mime Marceau, précisément parce qu’il ne parle pas et qu’il n’est pas por­teur d’un message politique.

           

            Ensuite, le rire est le plus souvent tourné vers sa propre fin. Les spectacles tradition­nels comme le cirque ou le théâtre de Guignol n’ont jamais eu pour vocation de changer le monde. Ils sont plutôt une parenthèse, un temps à part qui nous aide à supporter le monde, en nous « changeant les idées », pour reprendre une expression familière. Souvent, le rire est « potache », c’est-à-dire naïf et sans conséquence. D’une certaine façon, c’est le « rire absolu » dans la classification de Baudelaire, rire carnavalesque et libérateur.

 

            Finalement, le rire a ceci d’ambigu qu’il peut être mis au service de n’importe quelle cause, de n’importe quel projet politique. Avec des humoristes qui prônent la tolérance, les échanges entre les peuples, il sera mis au service d’une dénonciation des travers de l’hu­manité et d’un projet de mieux vivre ensemble. C’était déjà la défense de Molière dans sa préface de Tartuffe. C’est aujourd’hui le projet artistique de Fellag. Mais il peut aussi exa­cerber les antagonismes : c’est le rire misogyne ou le rire raciste, c’est-à-dire le rire qui soude un groupe contre un autre et non plus le rire qui unit dans la différence. Il faut reconnaître qu’il existe un rire nauséabond qui entretient les penchants les plus morale­ment condamnables.

            Exemples ?……………………………………………………………….

 

            En conclusion, le rire a tout pour être mis au service d’un monde meilleur. Pourtant, l’action politique n’est pas son domaine de prédilection.

            Au fond, c’est peut-être un bien que de le conserver pour lui-même. C’est ainsi qu’il nous aide le mieux à supporter le monde tel qu’il est à défaut de le changer.

Le rire : fiche vocabulaire

Fiche vocabulaire

 

 

  • Retrouver des expressions, proverbes évoquant le rire sous toutes ses formes.

 

 

 

 

 

  • Formuler des sujets qui feraient le lien entre le thème génération(s) et celui du rire.

 

 

 

 

 

  • Sélectionner les deux citations qui vous semblent les plus pertinentes.

 

 

Le rire châtie certains défauts à peu près comme la maladie châtie certains excès. Bergson

 

Rien n’est plus drôle que le malheur… c’est la chose la plus comique du monde. (S. Beckett)

 

Les larmes du monde sont immuables. Pour chacun qui se met à pleurer, quelque part un autre s’arrête. Il en va de même du rire. (Samuel Beckett)

 

“Le rire est satanique, il est donc profondément humain.” Charles Baudelaire ; De l’essence du rire,Curiosités esthétiques -1868.

 

L’humour est une tentative pour décaper les grands sentiments de leur connerie. Raymond Queneau

 

Qui de vous n’a pas regretté cet âge où le rire est toujours sur les lèvres. Jean-Jacques Rousseau

 

Le rire est un acte de supériorité, un triomphe de l’homme sur l’univers, une merveilleuse trouvaille qui réduit les choses à leurs justes proportions. Cioran

 

Nous savons que nous allons vers la mort et, face à cette occurrence inéluctable, nous n’avons qu’uninstrument : le rire. Umberto Eco

 

Rire c’est se réjouir d’un préjudice mais avoir bonne conscience Nietzsche Celui qui ne sait pas rire ne doit pas être pris au sérieux. Sollers Philippe

 

On se fait rarement rire seul parce qu’on on se surprend difficilement soi-même   Paul Valéry

 

« Je sais maintenant qu’à l’origine, le chaos fut illuminé d’un grand éclat de rire. » René Daumal

 

« Lorsque le premier bébé rit pour la première fois, son rire se brisa en un million de morceaux et ilssautèrent un peu partout. Ce fut l’origine des fées. » James Matthew Barrie

 

« Nul n’ira jusqu’au fond du rire d’un enfant. » Victor Hugo

 

« Le rire est une chose humaine, une vertu qui n’appartient qu’aux hommes et que Dieu, peut-être, leur a donné pour les consoler d’être intelligents. » Marcel Pagnol

 

« Celui qui ne sait pas rire ne doit pas être pris au sérieux. » Philippe Sollers

 

« La beauté du monde, qui est si fragile, a deux arêtes, l’une de rire, l’autre d’angoisse, coupant le coeur en deux. » Virginia Woolf

 

” Le rire est meilleur que la prière pour le salut de l’âme. ”    Henri Gougaud

 

«  Le rire est un excès préférable à l’incertitude du silence. »  Dominique Blondeau

 

” Qui fait rire l’esprit se rend maître du cœur. ”  cardinal de Bernis (1715-1794),

 

 « La tragédie stimule le sens du ridicule, car le ridicule est une attitude de défi : il faut rire de notre impuissance face aux forces de la nature. » Charlie Chaplin

 

« Le rire n’est jamais gratuit : l’homme donne à pleurer mais prête à rire. » Pierre Desproges

 

« La honte de rire vient de la crainte d’être surpris en état de moindre défense. » René Goscinny

 

« L’amour, l’amitié, c’est surtout rire avec l’autre, c’est partager le rire que de s’aimer. » Arletty

–          Proverbes

 

Suis le conseil de celui qui te fait pleurer, et non de celui qui te fait rire. “Proverbe Arabe

 

Qui t’aime te fait pleurer ; qui te hait te fait rire. “Proverbe Espagnol

 

“L’humour, c’est de savoir que tout, absolument tout, est drôle. Du moment que c’est aux autres que ça arrive.” (proverbe)

 

 

Tjème 2 : Le rire pour quoi faire ? Problématique

Thème : Rire : pour quoi faire ?

 

Problématique

 

            Rien ne semble plus spontané que le rire : on éclate de rire, on rit aux larmes, on en rit encore, on rit pour un rien. N’y-a-t-il dans le rire rien de sérieux, rien de sensé, aucune intention ?

 

            « Rire, boire et chanter ! » : on rit pour se distraire, on détend ses muscles et ses zygomatiques. L’image du rieur est celle d’un bon vivant qui sait conjuguer les plaisirs du corps et ceux de l’esprit.

 

            « Plus on est de fous, plus on rit ! » : on rit douze fois moins seul qu’en présence d’autres personnes, signe que le rire a une fonction sociale. On rit pour communiquer, pour échanger, on invente des blagues et des mots d’esprit dans une connivence joyeuse, on fait rire pour séduire. Dérider autrui est une façon d’humaniser les rapports inter-personnels.

 

            « C’est vraiment pour rire ? » : du rire collectif au rire d’exclusion, il n’y a qu’un pas. Le rire est souvent un rire contre autrui. Un groupe trouve volontiers sa cohésion dans l’exclusion railleuse et aime à désigner un bouc émissaire qui essuiera ses plaisanteries

.

            « Ah, je ris de me voir si belle en ce miroir ! » : la comédie et les humoristes nous offrent un reflet de nous-mêmes, de nos petits travers, et nous aident à porter un autre regard sur nous-mêmes.

 

            « Battez-moi plutôt, et me laissez rire tout mon soûl ! » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme) : rire offre un refuge salutaire à l’individu qui un jour a besoin de mettre une barrière entre le monde et lui. Rire manifeste une force de subversion qui s’oppose à un pouvoir abusif qui veut tout contrôler.

 

            Manifestation de sagesse individuelle et collective, rire ne permet-il pas en définitive de se construire ? Savoir rire de soi, accepter qu’on rie de soi, ne serait-ce pas autant de promesses d’une vie sociale apaisée ?

 

Indications bibliographiques

 

Littérature

Aristophane, Lysistrata.

Coluche, Et vous trouvez ça drôle ?

Pierre Dac, Dico franco-loufoque.

Pierre Desproges, Le Petit Reporter, Le Tribunal des flagrants délires.

Feydeau, La Dame de chez Maxim.

Hugo, L’Homme qui rit (livre II, chapitre 2 ; livre VIII, chapitre 7 ; livre IX, chapitre 2).

Hugo, Notre-Dame de Paris (livre I, chapitre 5).

Jarry, Ubu Roi.

Molière, Le Malade imaginaire, Le Bourgeois gentilhomme.

Rabelais, Gargantua.

Voltaire, Dictionnaire philosophique, article Foi, section III.

Zola, Nana ( chapitre 1).

 

Essais

Héliane Bernard, Alexandre Faure, C’est quoi le rire ? (2009).

Raymond Devos, Matière à rire (2006).

Sigmund Freud, Le Mot d’esprit et sa relation avec l’inconscient (1905).

Aymar du Chatenet, Caroline Guillot, René Goscinny, Faire rire, quel métier ! (2009).

Jim Holt, Petite Philosophie des blagues et autres facéties (2008).

Georges Minois, Histoire du rire et de la dérision (2000).

Olivier Mongin, Éclats de rire. Variations sur le corps comique (2001).

Valère Novarina, Pour Louis de Funès (1989).

Robert Provine, Le Rire, sa vie, son œuvre : le plus humain des comportements expliqué par la science (2003).

Jean-Michel Ribes, Le Rire de Résistance, de Diogène à Charlie Hebdo (2007).

Éric Smadja, Le Rire, Que sais-je ? (1993).

 

Films, documents iconographiques, bandes dessinées

D. Boon, Bienvenue chez les Ch’tis (2008).

C. Chaplin, Le Dictateur (1940).

B. Edwards, The Party (1968).

M. Hazanavicius, OSS117 Rio ne répond plus (2008).

G. Lautner, Les Tontons flingueurs (1963).

P. Leconte, Les Bronzés (1978), Ridicule (1995).

J. Lewis, Docteur Jerry et Mister Love (1963).

E. Lubitsch, To be or not to be (1942).

G. Oury, Les Aventures de Rabbi Jacob (1973).

J.-M. Poiré, Le père Noël est une ordure (1982).

F. Veber, Le Dîner de cons (1998).

J. Tati, Les Vacances de Monsieur Hulot (1953), Mon oncle (1958).

L. Tirard, Le Petit Nicolas (2009).

B. Wilder, Certains l’aiment chaud (1959).

Caricaturistes du XIX° siècle : Daumier, A. Gill.

Dessins de presse contemporaine : Cabu, Siné, Plantu, Wolinski.

Bandes dessinées humoristiques : Astérix (R. Goscinny, A. Uderzo), Titeuf (ZEP).

 

Sites et documents internet, médias

Captations de spectacles d’humoristes : Florence Forestie, Elie Kakou, Anne Roumanoff, Elie Semoun.

Chorégraphie : Ha ! Ha ! (Maguy Marin, 2006, Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape).

Émissions TV : Les Guignols de l’info ; Les Têtes à claques ; Les Jackass ; Les films en 5 secondes (par exemple «  Amadeus en 5 secondes »).

Presse satirique : Charlie-Hebdo, Le Canard Enchaîné.

« Mourir de rire ! » Courrier international, supplément au n°978-979-980 du 1er au 18 août 2009.

« Pourquoi les Français ont besoin de rire », Le Figaro magazine, 3-03-2008

http://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/

Vidéo INA : « Essayons de ne pas rire avant la fin d’Hamlet », La minute nécessaire de Monsieur Cyclopède – 13-02-1984

http://www.ina.fr/art-et-culture

Quelles sont les raisons de la difficulté à transmettre une culture patrimoniale, ambitieuse et élevée ?

Quelles sont les raisons de la difficulté à transmettre

 

une culture patrimoniale, ambitieuse et élevée ?

                                    

 

 Crise de l’autorité à l’école

 

 

 

            Rapports tendus entre les générations d’une époque à l’autre.

         Dans le milieu scolaire, ce clivage entre professeurs et élèves de plus en plus important et pose ainsi le problème de la transmission du savoir.

 

         Difficultés des jeunes à reconnaître l’importance de la connaissance : arrivée massive au lycée d’élèves issus des milieux populaires pas préparés à recevoir une culture enseignée jusque là à une élite = fort taux d’absentéisme et comportements perturbants.

         Les élèves touchés par l’échec scolaire sont issus de milieux populaires car celui-ci est souvent cause de difficultés familiales, d’apprentissage, ce qui va entraîner des lacunes dans leur cursus scolaire.

         + de mauvaises conditions familiales et matérielles d’existence (précarité professionnelle, chômage + familles monoparentales) = élts qui viennent s’ajouter aux difficultés d’apprentissage.

         + de nouvelles pratiques culturelles des jeunes = plus de temps consacrés à leurs loisirs virtuels qui entravent les apprentissages plus traditionnels sur le plan scolaire.

        

         Culture de l’immédiateté qui s’oppose à une culture plus spéculative (lecture, silence, concentration, retour sur un passé éloigné). Aujourd’hui, l’internet et ses réseaux sociaux permettent aux élèves de se construire une vie virtuelle et donc de s’évader de leur quotidien.

          La jeunesse actuelle est qualifiée d’égocentrique, c’est à dire qu’elle se construit autour de sa personne sans aucune référence au passé et à toutes les valeurs qu’il représente

         Ce qui s’est déroulé avant sa génération ne la concerne pas. Comment transmettre une culture patrimoniale à la jeunesse actuelle si elle ne prend en considération que la sienne ?

         Christophe Lasch diagnostiquait déjà ce constat dans un livre publié en 1981, « la Culture du Narcissisme », en déclarant : « vivre dans l’instant est la passion dominante – vivre pour soi-même, et non pour ses ancêtres ou la postérité. Nous sommes en train de perdre de la continuité historique, le sens d’appartenir à une successions de générations qui, nées dans le passé, s’étend vers le futur ».

 

 

         L’école, considérée comme vecteur primordial de transmission du savoir et de la culture = en crise. Objectifs de plus en plus difficiles à atteindre : enseigner le socle commun de connaissances que chaque enfant doit posséder à la sortie du système scolaire tout en véhiculant des valeurs fondamentales gagnées dans le passé et transmises à chaque génération.

        

         conséquences pour la nouvelle génération : lacunes dans la maîtrise de sa propre langue (grammaire, orthographe), sur le plan culturel (sentiment d’appartenance à une nation de haute culture) et sur le plan du savoir-vivre = handicaps au niveau de l’insertion professionnelle (rapport avec l’autorité problématique).

          Crise de l’autorité de l’école = recrudescence de la violence au sein même des classes et dans l’enceinte des établissements scolaires + attitudes négatives en classe (bavardages, absentéismes, déconcentration…)

 

        

          Des écoles étrangères ont peut-être trouvé le moyen de transmettre à la génération actuelle une culture patrimoniale sans susciter le désintérêt des jeunes.

         En Finlande, la devise est que « chaque élève est important ». Les établissements sont autonomes par rapport au gouvernement. En effet, ils n’agissent pas sous la pression d’un programme à tenir à tout prix tout au long de l’année.

         De plus, la formation des professeurs est plus exigeante, plus appuyée et donc permet une meilleure efficacité dans la manière de transmettre le savoir. Par ailleurs, les élèves sont pris en charge dès l’apparition des premières difficultés. Les classes n’étant pas surchargées, les professeurs peuvent en effet prendre plus de temps à corriger les lacunes des élèves et peuvent réagir au cas par cas. Le redoublement est un fait exceptionnel en Finlande. En effet, il est quasi inexistant, comme peuvent le prouver les bons résultats que connaissent les établissements du pays.

         Les Finlandais n’ont pas la même vision de la scolarité qu’en France. Ils la voient moins agressive dans le sens où elle ne place jamais l’élève en position de faiblesse irrémédiable et en compétition avec ses camarades. En effet, pour ne pas perturber le suivi des élèves et leur permettre de toujours évoluer de manière positive, leurs notes n’apparaissent qu’au bout de sept ans. C’est à ce moment là que les élèves commencent à choisir eux-mêmes les options qu’ils souhaitent étudier et former ainsi leur propre cursus scolaire. Cette méthode est peut être le moyen de faire adhérer les jeunes à l’école et de trouver le plaisir de recevoir un enseignement. Le fait de permettre aux élèves de faire leurs propres choix les responsabilise face à leur avenir.

         La pédagogie finlandaise en milieu scolaire met en valeur la coopération, l’entraide et les activités des élèves.

         Face à des élèves aussi attentifs et des professeurs si bien formés, on peut constater que la transmission de la culture patrimoniale devient alors plus aisée et est considérée de façon plus appréciable. Les élèves prennent en considération le message émit par leurs professeurs. Ils ne voient pas en l’école un ennemi contre lequel se rebeller.

         La Finlande a réalisé l’objectif visé par de nombreuses démocraties : un système éducatif performant qui corrige les inégalités sociales.

 

         En Allemagne, l’école primaire connait également un taux de réussite conséquent. Il s’agit, pour leur système scolaire, de ne pas mettre sous pression les élèves. Il n’existe pas de notes dans les deux premières années, juste des appréciations orales. Cette méthode permet, tout comme en Finlande, de ne pas porter un jugement noté sur l’enfant afin de lui permettre de positiver et de ne pas se décourager à cause d’un chiffre. L’appréciation orale permet à l’enseignant de donner des avis positifs et moins positifs sur le niveau scolaire de l’enfant tout en gardant à l’esprit de le mener sur le chemin de la réussite. Les élèves adoptent une attitude respectueuse vis-à-vis de leurs professeurs, ils ne les voient pas comme des juges intimidants rabaissant leur travail. En France, ce problème est assez récurrent : les élèves en difficultés recevant des notes très faibles ont l’impression d’être rabaissés, ils perdent toute motivation et dénote un désintérêt particulier envers les matières scolaires. Ce constat renforce le problème de transmission d’une culture patrimoniale.

        

         En Allemagne également, les redoublements sont très rares. Les cours ne se déroulent pas comme en France. On parle là-bas de cours « ouverts », de projets collectifs qui proposent une ambiance plus agréable et plus propice à l’éducation. Les professeurs allemands sont intensivement formés à la pédagogie, ils savent ainsi mieux réagir face aux élèves et s’adapter à tous les comportements.

         Dans ce pays également, le rapport entre la génération des professeurs et la génération des élèves ne pose pas de problème. Leur conditionnement scolaire et leur présentation de l’école comme un lieu de culture et de réussite permet une transmission du savoir naturelle et efficace.

 

 

          Former intensivement les professeurs, amenuiser les journées de cours, proposer des formes de cours différentes, ne pas imposer de notes comme seuls juges du niveau scolaires… Ces qualités communes à la Finlande et à l’Allemagne ont permis à ces deux pays de connaître des taux de réussite conséquents. Ils ont trouvé le moyen de captiver la jeunesse, le leur inculquer le plaisir d’apprendre, de recevoir un savoir, afin, pour la suite, de s’insérer au mieux dans le milieu professionnel et de pouvoir également transmettre à leur tour aux générations futures ce qu’ils ont appris.

 

         L’école doit rester un lieu de partage de culture, de transmission de savoirs et de coopération entre le passé instruit par les professeurs et l’avenir des jeunes qui se construit.

 

                                                        Johanna Julé et Céline Besnard

 

 

 

Julé Johanna & Besnard Céline

Pourquoi est ce si difficile de transmettre aujourd’hui une culture patrimoniale ambitieuse et élevée ?

 

A l’origine, l’enseignement était source de savoir, de culture et de respect. Il était valorisé au sein de la société et le savoir acquis par un homme était source d’élévation sociale et culturelle. Aujourd’hui, l’école est perçue de façon négative par les élèves, et les professeurs ont du mal à faire reconnaître l’importance de la connaissance face à la nouvelle génération.

            Ce constat actuel trouve son origine, tout d’abord, dans des raisons sociales, familiales et culturelles. Il s’appuie également sur la perte de qualité de l’enseignement dans le système scolaire et le désarroi des professeurs face à la nouvelle génération.

Toutefois, certaines écoles ne sont pas confrontées à ce problème et certains pays ont peut-être en main la solution d’avenir tels qu’en Finlande ou en Allemagne.

           

         Tout d’abord, La nouvelle génération a des difficultés à reconnaître l’importance de la connaissance à cause de raisons sociales, car nous pouvons remarquer que ce sont généralement les élèves issus de familles précaires qui affichent un fort taux d’absentéisme ou des comportements perturbants.

 De plus, certaines familles de classe ouvrière connaissent des contraintes horaires qui limitent la présence des parents dans la sphère familiale et désaccordent les rythmes familiaux les enfants se retrouvent donc seul face à leur désarroi. En effet, de mauvaises conditions familiales et matérielles d’existence peuvent survenir à des difficultés d’apprentissage.

Cependant, ce constat est également dû à la déresponsabilisation des parents dans l’éducation scolaire de leurs enfants, autrement dit dû à des raisons familiales. En effet, ces familles ne sont pas soudées par la solidarité familiale en raison de séparations conflictuelles ou de processus de déclassement, par une absence d’emploi ou encore une instabilité résidentielle. Ces phénomènes sont des facteurs aux problèmes scolaires.

De nos jours, la génération actuelle renonce facilement devant les difficultés scolaires, les élèves adoptent donc un comportement méprisant: oubli de matériels, retards, absences, évitement des contraintes pédagogiques, ceux ci sont alors considérés comme de mauvais élèves.

            En effet, les professeurs sont confrontés aux handicaps scolaires de certains élèves ce qui les classes hors des normes scolaires.  Cependant, il existe aujourd’hui une inégalité des chances accrédite l’idée que l’inégalité dont souffrent les élèves des milieux populaires serait pour une large part le fruit de la négligence parentale.

            En outre, notre culture peut être un frein à l’éducation. En effet, l’entrée des nouvelles technologies dans nos foyers déconcentrent les élèves de leurs objectifs de réussite scolaire. Ils consacrent plus de temps à leurs loisirs virtuels et négligent, de ce fait, leurs travaux scolaires. La génération actuelle donne une importance démesurée au domaine de l’internet. En effet, cette technologie est notre avenir, c’est pour cela que les élèves se désintéressent de leur culture patrimoniale ainsi qu’à l’histoire de leur pays. Aujourd’hui, l’internet et ses réseaux sociaux permettent aux élèves de se construire une vie virtuelle et donc de s’évader de leur quotidien.

            Nous pouvons donc en conclure que la culture technologique actuelle est synonyme de détente pour ces élèves ce qui leur permet de s’évader mais aussi de ne pas remplir les contraintes scolaires.

En outre, la perte de qualité de l’enseignement dans le système scolaire pénalise également la transmission culturelle entre professeurs et élèves.

En premier lieu, l’école, considérée comme vecteur primordial de transmission du savoir et de la culture, connait des jours difficiles. En effet, il est délicat de répondre à la loi fondamentale que l’école s’impose à elle-même et tente d’appliquer à la société : enseigner le socle commun de connaissances que chaque enfant doit posséder à la sortie du système scolaire tout en véhiculant des valeurs fondamentales gagnées dans le passé et transmises à chaque génération.

            Le problème actuel est que la jeunesse n’est plus aussi réceptive qu’autrefois au message transmis par la génération plus ancienne. Ce souhait de se démarquer toujours plus l’éloigne peu à peu des connaissances du passé, tant au niveau de la nation même – son patrimoine – que du monde entier. Et c’est à ce moment là que le système scolaire ne fait plus le poids. En effet, le style d’enseignement, aussi changeant soit-il au fil des années, ne réussit pas à accrocher l’attention des élèves et à les faire apprécier venir en cours. Le discours des professeurs ne résonnent plus de la même façon qu’auparavant dans les oreilles des jeunes et la qualité de l’enseignement en pâtit.

Un autre problème se pose de nos jours. La jeunesse actuelle est qualifiée d’égocentrique, c’est à dire qu’elle se construit autour de sa même personne sans aucune référence au passé et à toutes les valeurs qu’il représente. Elle vit dans l’immédiateté. Ce qui s’est déroulé avant sa génération ne la concerne pas. De ce fait, comment transmettre une culture patrimoniale à la jeunesse actuelle si elle ne prend en considération que la sienne?

Christophe Lasch diagnostiquait déjà ce constat dans un livre publié en 1981, « la Culture du Narcissisme », en déclarant : « vivre dans l’instant est la passion dominante – vivre pour soi-même, et non pour ses ancêtres ou la postérité. Nous sommes en train de perdre de la continuité historique, le sens d’appartenir à une successions de générations qui, nées dans le passé, s’étend vers le futur ».

            De ce fait, les professeurs sont alors dépassés par les évènements. Ils ne trouvent plus le moyen, la bonne façon de faire en sorte de captiver l’attention des élèves et de leur faire comprendre l’importance de la culture. Ils sont vus comme des bourreaux, obligeant leurs élèves à faire des exercices, des devoirs et des leçons inintéressants et inutiles, et perdent la valeur qui leur était autrefois accordé.

            Ils ne perçoivent pas en face d’eux des personnes prêtes à recevoir des connaissances leur permettant de comprendre le monde qui les entoure afin de mieux l’appréhender(d’un point de vue professionnel). Les enseignants, malgré le désir de vouloir transmettre toutes les valeurs humaines et culturelles qui composent notre monde, peuvent se sentir découragés face à une jeunesse désintéressée. Cette désolation actuelle comporte de lourdes conséquences sur la nouvelle génération : lacunes en langues (grammaire, orthographe), en culture patrimoniale et en savoir-vivre qui pèsent énormément au niveau de l’insertion professionnelle et du rapport avec l’autorité.

De plus, il existe un autre problème auquel les professeurs doivent faire face : la recrudescence de la violence et de sa banalité au sein même des classes et dans l’enceinte des établissements scolaires. A ceci s’ajoutent également des problèmes quotidiens en classe qui ralentissent l’enseignement : bavardages, absentéismes, déconcentration… Des soucis récurrents qui prennent de plus en plus de place et de temps dans un cours et empêchent, de ce fait, une bonne écoute et une bonne transmission des leçons. Les professeurs doivent en effet consacrer beaucoup de temps pour régler ces divers problèmes et un peu moins pour s’occuper des élèves, résoudre leurs difficultés scolaires, les suivre activement…

            Par ailleurs, le système scolaire n’est plus le même qu’avant : les classes sont surchargées, ce qui empêchent les professeurs de s’occuper de chaque élève au cas par cas. De plus, les réformes instaurées par le gouvernement depuis une dizaine d’années pour sauver l’école française n’ont jamais abouti à terme à l’amélioration de celle-ci.

            Mais, tous ces problèmes rencontrés au sein même du système scolaire français et toutes les solutions mises en place pour les résoudre ne sont pas le souci de certaines écoles étrangères. Celles-ci ont peut être trouver le moyen de transmettre à la génération actuelle une culture patrimoniale sans susciter le désintérêt des jeunes.

En Finlande, la devise est que « chaque élève est important ». Les établissements sont autonomes par rapport au gouvernement. En effet, ils n’agissent pas sous la pression d’un programme à tenir à tout prix tout au long de l’année.

            De plus, la formation des professeurs est plus exigeante, plus appuyée et donc permet une meilleure efficacité dans la manière de transmettre le savoir. Par ailleurs, les élèves sont pris en charge dès l’apparition des premières difficultés. Les classes n’étant pas surchargées, les professeurs peuvent en effet prendre plus de temps à corriger les lacunes des élèves et de réagir au cas par cas. Le redoublement est un fait exceptionnel en Finlande. En effet, il est quasi inexistant, comme peuvent le prouver les bons résultats que connaissent les établissements du pays.

            Les Finlandais n’ont pas la même vision de la scolarité qu’en France. Ils la voient moins agressive dans le sens où elle ne place jamais l’élève en position de faiblesse irrémédiable et en compétition avec ses camarades (correction des inégalités). En effet, pour ne pas perturber le suivi des élèves et leur permettre de toujours évoluer de manière positive, leurs notes n’apparaissent qu’au bout de sept ans. C’est à ce moment là que les élèves commencent à choisir eux-mêmes les options qu’ils souhaitent étudier et former ainsi leur propre cursus scolaire. Cette méthode est peut être le moyen de faire adhérer les jeunes à l’école et de trouver le plaisir de recevoir un enseignement. Le fait de permettre aux élèves de faire leurs propres choix les responsabilise face à leur avenir.

Par ailleurs, la pédagogie finlandaise en milieu scolaire met en valeur la coopération, l’entraide et les activités des élèves. En effet, ils disposent, avant leurs études supérieures, de leur après-midi pour s’adonner à leurs activités sportives. Ce système permet aux élèves d’être plus performants en cours car ils ne sont pas constamment confrontés aux obligations scolaires et mettent donc plus de volonté à étudier.

            Face à des élèves aussi attentifs et des professeurs si bien formés, on peut constater que la transmission de la culture patrimoniale devient alors plus aisée et est très appréciée. Les élèves prennent en considération le message émit par leurs professeurs. Ils ne voient pas en l’école un ennemi envers lequel il faut se rebeller.

            La Finlande a réalisé l’objectif visé par de nombreuses démocraties : un système éducatif performant qui corrige les inégalités sociales.

            En Allemagne, l’école primaire connait également un taux de réussite conséquent. Il s’agit, pour leur système scolaire, de ne pas mettre sous pression les élèves. Il n’existe pas de notes dans les deux premières années, juste des appréciations orales. Cette méthode permet, tout comme en Finlande, de ne pas porter un jugement noté sur l’enfant afin de lui permettre de positiver et de ne pas se décourager à cause d’un chiffre. L’appréciation orale permet à l’enseignant de donner des avis positifs et moins positifs sur le niveau scolaire de l’enfant tout en gardant à l’esprit de le mener sur le chemin de la réussite. Les élèves adoptent une attitude respectueuse vis-à-vis de leurs professeurs, ils ne les voient pas comme des juges intimidants rabaissant leur travail. En France, ce problème est assez récurrent : les élèves en difficultés recevant des notes très faibles ont l’impression d’être rabaissés, ils perdent toute motivation et dénote un désintérêt particulier envers les matières scolaires. Ce constat renforce le problème de transmission d’une culture patrimoniale.

            En Allemagne également, les redoublements sont très rares. Les cours ne se déroulent pas comme en France. On parle là-bas de cours « ouverts », de projets collectifs qui proposent une ambiance plus agréable et plus propice à l’éducation. Les professeurs allemands sont intensivement formés à la pédagogie, ils savent ainsi mieux réagir face aux élèves et s’adapter à tous les comportements.

            Dans ce pays également, le rapport entre la génération des professeurs et la génération des élèves ne pose pas de problème. Leur conditionnement scolaire et leur présentation de l’école comme un lieu de culture et de réussite permet une transmission du savoir naturelle et efficace.

            Former intensivement les professeurs, réduire les journées de cours, proposer des formes de cours différentes, ne pas imposer de notes comme seuls juges du niveau scolaires… Ces qualités communes à la Finlande et à l’Allemagne ont permis à ces deux pays de connaître des taux de réussite conséquents. Ils ont trouvé le moyen de captiver la jeunesse, le leur inculquer le plaisir d’apprendre, de recevoir un savoir, afin, pour la suite, de s’insérer au mieux dans le milieu professionnel et de pouvoir également transmettre à leur tour aux générations futures ce qu’ils ont appris.

           

            L’école est un lieu d’éducation où les professeurs essayent de transmettre une culture patrimoniale ambitieuse et élevée. Cependant, cette culture devient difficile à transmettre en raison d’un cumul de problèmes sociaux, familiaux et culturels. Ces problèmes engendrent des difficultés d’apprentissage ainsi qu’un rejet du langage scolaire. La génération actuelle et en particulier les milieux populaires subissent un phénomène d’échec scolaire,

            Cependant, pour faire face à ces difficultés certains pays ont mis en place un système d’éducation qui pourrait être la solution à nos problèmes.

 

Besnard Céline & Julé Johanna